3 - Anne : Mon cœur exulte à cause du Seigneur ; mon front s’est relevé grâce à mon Dieu !

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En parcourant l'Ecriture... Les figures de la Vierge Marie dans l'Ancien Testament (4/8)

Anne, mère de Samuel

3ème étape de notre parcours, voici Anne, mère de Samuel, nouvelle préfiguration de la Sainte Vierge dans l’Ancien Testament.

I – En Dieu, j’ai mis ma confiance

Lorsque nous rencontrons Anne dans l’Ancien Testament, dans le Premier livre de Samuel, elle est triste et affligée, car le Seigneur ne Lui a pas donné d’enfant… Alors qu’elle est en pèlerinage au sanctuaire du Seigneur, elle supplie le Seigneur :

 « Anne, […] se mit à prier le Seigneur et pleura abondamment. Elle fit un vœu en disant : ‘Seigneur de l’univers ! Si tu veux bien regarder l’humiliation de ta servante, te souvenir de moi, ne pas m’oublier, et me donner un fils, je le donnerai au Seigneur pour toute sa vie, et le rasoir ne passera pas sur sa tête.’  Tandis qu’elle prolongeait sa prière devant le Seigneur, Éli observait sa bouche. Anne parlait dans son cœur : seules ses lèvres remuaient, et l’on n’entendait pas sa voix. Éli pensa qu’elle était ivre. […] Anne répondit : ‘ Non, mon seigneur, je ne suis qu’une femme affligée, je n’ai bu ni vin ni boisson forte ; j’épanche mon âme devant le Seigneur. Ne prends pas ta servante pour une vaurienne : c’est l’excès de mon chagrin et de mon dépit qui m’a fait prier aussi longtemps.’ Éli lui répondit : ‘ Va en paix, et que le Dieu d’Israël t’accorde ce que tu lui as demandé.’ Anne dit alors : ‘Que ta servante trouve grâce devant toi !’ Elle s’en alla, elle se mit à manger, et son visage n’était plus le même. » (1S1, 10-18)

On voit combien Anne prie avec ferveur, à tel point que le prêtre Eli la pense ivre ! Et on admire aussi sa grande confiance après avoir reçu la bénédiction d’Eli : elle sait que le Seigneur l’a entendue – alors-même qu’elle parlait « dans son cœur - et elle repart confiante, et cela se voit même sur son visage.

On retrouve dans l’attitude d’Anne celle de la Vierge Marie :

- attitude de prière fervente, qui garde dans son cœur les évènements et les médite ; avec ces deux femmes, on perçoit que le « temple intérieur » est le lieu de la prière, de la rencontre avec Dieu ;

- attitude de foi confiante, qui sait que son Fils l’a entendu à Cana même s’Il ne lui a pas répondu dans ce sens : la preuve, c’est que Marie va ensuite trouver les serviteurs pour les avertir. On peut entendre ici la voix de Jésus qui nous dit dans l’Evangile : « Amen, je vous le dis : si vous avez la foi et si vous ne doutez pas, vous ne ferez pas seulement ce que j’ai fait au figuier ; vous pourrez même dire à cette montagne : “Enlève-toi de là, et va te jeter dans la mer”, et cela se produira. Tout ce que vous demanderez dans votre prière avec foi, vous l’obtiendrez. » (Mt 21, 21-22).

Dans l’Ancien Testament comme dans le Nouveau, les femmes sont souvent celles qui gardent et portent l’espérance du Peuple. Le Catéchisme de l’Eglise Catholique nous dit : « Par les prophètes, Dieu forme son peuple dans l’espérance du salut, dans l’attente d’une Alliance nouvelle et éternelle destinée à tous les hommes […]. Ce seront surtout les pauvres et les humbles du Seigneur qui porteront cette espérance. Les femmes saintes comme Sara, Rébecca, Rachel, Miryam, Débora, Anne, Judith et Esther, ont conservé vivante l’espérance du salut d’Israël. La figure la plus pure en est Marie (cf. Lc 1, 38). »[1] A la suite des saintes femmes, Jean-Paul II, alors qu’il était à Lourdes en 2004, avait demandé à toutes les femmes d’être des « sentinelles de l’Invisible » : « De cette grotte, je vous lance un appel spécial à vous, les femmes. En apparaissant dans la grotte, Marie a confié son message à une fille, comme pour souligner la mission particulière qui revient à la femme, à notre époque tentée par le matérialisme et par la sécularisation : être dans la société actuelle témoin des valeurs essentielles qui ne peuvent se percevoir qu’avec les yeux du cœur. A vous, les femmes, il revient d’être sentinelles de l’Invisible ! »[2]

II – Un fils, don de Dieu

La stérilité d’Anne apparaît comme dépendante du dessein de Dieu : « [Elcana, son mari] aimait Anne, que pourtant le Seigneur avait rendue stérile. » (1S 1,5). Comme Job, les croyants du Peuple de Dieu savent que toute leur vie dépend de Dieu, que Celui-ci donne ou reprenne : « Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris : Que le nom du Seigneur soit béni ! » (Jb 1,21). Non seulement Anne ne se révolte pas contre Dieu dans sa situation, mais plus encore elle met toute sa confiance en Lui pour la résoudre ; en ce sens, St Paul dira aux Romains : « Nous le savons, quand les hommes aiment Dieu, lui-même fait tout contribuer à leur bien, puisqu'ils sont appelés selon le dessein de son amour. » (Rm 8,28).

Et en effet, le Seigneur l’a exaucée : « Anne conçut et, le temps venu, elle enfanta un fils ; elle lui donna le nom de Samuel (c’est-à-dire : Dieu exauce) car, disait-elle : ‘ Je l’ai demandé au Seigneur.’ » (1S 1,20).

Comme avec Sara, nous voyons que « rien n’est impossible à Dieu » et Samuel sera ainsi une préfiguration du Messie, pour la conception duquel Dieu intervient plus directement (et pour Jésus cela sera exclusivement !). Anne est donc ici une image de Marie attendant le fils promis par Dieu

III – Action de grâce

Nous avons l’habitude de prier pour demander… mais avons-nous celle de remercier, de rendre grâce à Dieu pour les dons qu’Il nous fait ? Le Catéchisme de l’Eglise Catholique nous dit : « Comme dans la prière de demande, tout événement et tout besoin peuvent devenir offrande d’action de grâces. Les lettres de S. Paul commencent et se terminent souvent par une action de grâces, et le Seigneur Jésus y est toujours présent. " En toute condition, soyez dans l’action de grâces. C’est la volonté de Dieu sur vous dans le Christ Jésus " (1 Th 5, 18). " Soyez assidus à la prière ; qu’elle vous tienne vigilants dans l’action de grâces " (Col 4, 2). »[3]

Anne, après la naissance de Samuel, tient sa promesse de le consacrer entièrement au Seigneur : « Lorsque Samuel fut sevré, Anne, sa mère, le conduisit à la Maison du Seigneur, à Silo ; l’enfant était encore tout jeune. […] On amena l’enfant au prêtre Éli. Anne lui dit alors : ‘ Écoute-moi, mon seigneur, je t’en prie ! Aussi vrai que tu es vivant, je suis cette femme qui se tenait ici près de toi pour prier le Seigneur. C’est pour obtenir cet enfant que je priais, et le Seigneur me l’a donné en réponse à ma demande. À mon tour je le donne au Seigneur pour qu’il en dispose. Il demeurera à la disposition du Seigneur tous les jours de sa vie. » Alors ils se prosternèrent devant le Seigneur.’ » (1S 1, 24-28)

On voit ici une figure de la Sainte Vierge qui viendra consacrer Jésus au Temple ; c’est certes le rituel à accomplir pour tout premier-né garçon du peuple hébreu, mais pour Anne comme pour Marie, ce don est réalisé de manière plus totale : Samuel restera au Temple avec le prêtre Eli, et Marie est bien consciente du don total de Jésus pour accomplir la volonté du Père et elle s’offre elle-même avec Lui : « Marie, la mère de Jésus s'associe par le même mouvement d'oblation à la présentation du Christ. Une fois encore est manifestée l'union permanente du Fils et de sa Mère dans leur offrande unique et totale pour le salut du monde. […] La Vierge Marie qui porte Jésus au temple et l'offre au Seigneur exprime très bien l'attitude de l'Eglise qui continue d'offrir ses fils et ses filles au Père et les associe à l'unique oblation du Christ, cause et modèle de toute consécration dans l'Eglise »[4] disait Jean-Paul II le 2 février 1997, alors qu’il instituait la journée de la vie consacrée.

Et en venant offrir Samuel au Temple, Anne est remplie d’action de grâce pour le don que le Seigneur Lui a fait : elle entonne une prière dont les accents se retrouveront dans le Magnificat de la Sainte Vierge (cf. tableau comparatif)…

« Et Anne fit cette prière : Mon cœur exulte à cause du Seigneur ; mon front s’est relevé grâce à mon Dieu ! Face à mes ennemis, s’ouvre ma bouche : oui, je me réjouis de ton salut ! Il n’est pas de Saint pareil au Seigneur. – Pas d’autre Dieu que toi ! Pas de Rocher pareil à notre Dieu ! Assez de paroles hautaines, pas d’insolence à la bouche. Le Seigneur est le Dieu qui sait, qui pèse nos actes. L’arc des forts est brisé, mais le faible se revêt de vigueur. Les plus comblés s’embauchent pour du pain, et les affamés se reposent. Quand la stérile enfante sept fois, la femme aux fils nombreux dépérit. Le Seigneur fait mourir et vivre ; il fait descendre à l’abîme et en ramène. Le Seigneur rend pauvre et riche ; il abaisse et il élève. De la poussière, il relève le faible, il retire le malheureux de la cendre pour qu’il siège parmi les princes, et reçoive un trône de gloire. Au Seigneur, les colonnes de la terre : sur elles, il a posé le monde. Il veille sur les pas de ses fidèles, et les méchants périront dans les ténèbres. La force ne rend pas l’homme vainqueur : les adversaires du Seigneur seront brisés. Le Très-Haut tonnera dans les cieux ; le Seigneur jugera la terre entière. Il donnera la puissance à son roi, il relèvera le front de son messie. » (1S 2, 1-10)

 

Cantique d’Anne (1S 2, 1-10) Cantique de Marie (Magnificat, Lc 1, 46-55)
Mon cœur exulte à cause du Seigneur ;
oui, je me réjouis de ton salut !
Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur !
mon front s’est relevé grâce à mon Dieu ! Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles
Il n’est pas de Saint pareil au Seigneur. Pas d’autre Dieu que toi ! Saint est son nom !
Assez de paroles hautaines, pas d’insolence à la bouche. Le Seigneur est le Dieu qui sait, qui pèse nos actes. Sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent.
L’arc des forts est brisé, mais le faible se revêt de vigueur. Le Seigneur fait mourir et vivre ; il fait descendre à l’abîme et en ramène. Déployant la force de son bras, il disperse les superbes. Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles.
Les plus comblés s’embauchent pour du pain, et les affamés se reposent.
Le Seigneur rend pauvre et riche ; il abaisse et il élève.
Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides.
De la poussière, il relève le faible, il retire le malheureux de la cendre pour qu’il siège parmi les princes, et reçoive un trône de gloire. Il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour,
Il donnera la puissance à son roi, il relèvera le front de son messie. de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais.

La Sainte Vierge est tellement « pétrie des Ecritures » qu’elle a si souvent méditées, que tout naturellement lui viennent à la bouche les expressions déjà utilisées dans l’Ancien Testament pour rendre grâce au Seigneur. Nous aussi, nous sommes invités à faire nôtres les paroles de l’Ecriture, celles des Psaumes par exemple, pour glorifier Dieu avec les mots que Lui-même nous a donnés !

IV – Mater et magistra

Dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique, nous lisons : « Samuel enfant a dû apprendre de sa mère Anne comment " se tenir devant le Seigneur " (cf. 1 S 1, 9-18) et du prêtre Eli comment écouter Sa Parole : " Parle, Seigneur, car ton serviteur écoute " (1 S 3, 9-10). Plus tard, lui aussi connaîtra le prix et le poids de l’intercession : " Pour ma part, que je me garde de pécher contre le Seigneur en cessant de prier pour vous et de vous enseigner le bon et droit chemin " (1 S 12, 23). »[5]

Anne a donc été la mère et éducatrice[6] du jeune Samuel dans la vie naturelle comme dans la vie spirituelle. « Le cœur des enfants renferme une grande richesse intérieure. Mais l'enfant n'est pas capable de discerner, à lui seul, les appels qu'il ressent en lui-même. Ce sont les « grandes personnes » — parents, éducateurs, opérateurs des mass media — qui ont le devoir et la possibilité d'aider les enfants à les découvrir. Chaque enfant ne ressemble-t-il pas, en quelque sorte, au jeune Samuel dont parle l'Ecriture ? Incapable d'interpréter l'appel de Dieu, il demande l'aide de son maître… » [7] disait Jean-Paul II dans son message pour la journée des communications sociales (1979).

Marie, à son tour, sera la Mère et éducatrice non pas tant de Jésus (même si, étant vrai homme, il a aussi eu besoin d'éducation pour "grandir en sagesse" (cf. Lc 1,80)) mais de tous les fils qu’Il lui confiera par la suite : « Elle engendra son Fils, dont Dieu a fait le premier-né parmi beaucoup de frères (Rm 8, 29), c’est-à-dire parmi les croyants, à la naissance et à l’éducation desquels elle apporte la coopération de son amour maternel. […] Son amour maternel la rend attentive aux frères de son Fils dont le pèlerinage n’est pas achevé, et qui se trouvent engagés dans les périls et les épreuves, jusqu’à ce qu’ils parviennent à la patrie bienheureuse. C’est pourquoi la bienheureuse Vierge est invoquée dans l’Église sous les titres d’avocate, auxiliatrice, secourable, médiatrice»[8] lit-on dans la Constitution dogmatique Lumen gentium.

V – Anne, Marie et l’Eglise

 « Son mari Elcana lui dit : ‘Anne, pourquoi pleures-tu ? Pourquoi ne manges-tu pas ? Pourquoi ton cœur est-il triste ? Et moi, est-ce que je ne compte pas à tes yeux plus que dix fils ?’ » (1S 1,8).

Bien qu’elle aime son mari et que son mari l’aime, Anne ne peut se satisfaire de sa seule présence, comme l’Epouse - qu’est l’Eglise - ne peut se satisfaire seulement de la présence de l’Epoux - qu’est le Christ - : elle a le souci de lui donner beaucoup d’enfants !

C’est aussi le souci de Marie que de conduire toutes les âmes à Jésus, d’enfanter pour Lui des âmes pour le Ciel : « Dieu le Père a communiqué à Marie sa fécondité autant  qu'une pure créature en était capable, pour lui donner le pouvoir de produire son Fils et tous les membres de son Corps mystique. »[9] dit Saint Louis-Marie Grignion de Montfort dans son traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge. Et on voit combien Marie a le souci de tous ses enfants dans les nombreux messages qu’elle nous laisse au cours de ses apparitions !

À sa suite, les consacrés doivent donner leur vie pour faire naître à la vie divine beaucoup d’âmes : « La vie consacrée a toujours été située de manière privilégiée aux côtés de Marie, la Vierge épouse. De cet amour virginal résulte une fécondité particulière, qui contribue à la naissance et à la croissance de la vie divine dans les cœurs. La personne consacrée, sur les traces de Marie, nouvelle Ève, réalise sa fécondité spirituelle en se faisant accueillante à la Parole, pour coopérer à la construction de l'humanité nouvelle par son dévouement inconditionnel et par son vivant témoignage. L'Église manifeste ainsi pleinement sa maternité par la communication de l'action divine, confiée à Pierre, et par l'accueil responsable du don divin, caractéristique de Marie. »[10]

Alors que nous venons de célébrer le Dimanche de prière pour les vocations – Dimanche du Bon Pasteur – prions pour que de nombreux jeunes entendent cet appel pressant de Jésus, appel à donner leur vie pour le Salut des âmes.

[hr] Pour retrouver les autres figures de la Vierge Marie dans l'Ancien Testament : (1) Ève - (2) Sara [hr]

[1] Catéchisme de l’Eglise Catholique – n°64

[2] Jean-Paul II – Homélie à Lourdes, 15 août 2004

[3] Catéchisme de l’Eglise Catholique – n°2638

[4] Jean-Paul II – message pour la 1ère journée de la vie consacrée – 2 février 1997

[5] Catéchisme de l’Eglise Catholique n° 2578

[6] Mater et Magistra : tel est le titre d’une encyclique de Jean XXIII (1964) qui commence ainsi : « MÈRE ET ÉDUCATRICE de tous les peuples, l'Eglise universelle a été instituée par Jésus-Christ pour que tous les hommes au long des siècles trouvent en son sein et dans son amour la plénitude d'une vie plus élevée et la garantie de leur salut. »

[7] Jean-Paul II – Message pour la XXIIIe journée mondiale des communications sociales – 27 mai 1979

[8] Concile Vatican II – Constitution dogmatique Lumen gentium – n°63 et n°62

[9] Saint Louis-Marie Grignion de Montfort – Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge – n°17

[10] Jean-Paul II - Exhortation apostolique Vita consecrata (1996) – n°34

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