La liberté droit fondamental et respect de l'autre
Question d'un journaliste : Dans le respect des différentes religions, jusqu’à quel point peut-on arriver dans la liberté d’expression, qui est elle aussi un droit humain fondamental?
Merci de cette question, elle est intelligente. Je crois que tous les deux sont des droits humains fondamentaux: la liberté religieuse et la liberté d’expression. On ne peut pas... Imaginons... Vous êtes français, allons à Paris! Parlons clairement. On ne peut pas cacher une vérité, qui est que chacun a le droit de pratiquer sa propre religion, sans offenser, librement. C’est ce que nous faisons, que nous voulons tous faire. Deuxièmement, on ne peut pas offenser, faire la guerre, tuer au nom de sa religion, c’est-à-dire au nom de Dieu. Ce qui se passe à présent nous fait un peu... nous étonne. Mais pensons toujours à notre histoire: combien de guerres de religion avons-nous eues! Pensez à la «nuit de la Saint-Barthélémy»... comment comprendre cela? Nous aussi nous avons été pécheurs sur ce point. Mais on ne peut pas tuer au nom de Dieu. Cela est une aberration. Tuer au nom de Dieu est une aberration. Je crois que cela est le principal à propos de la liberté de religion: on doit la pratiquer avec liberté, sans offenser, mais sans imposer ni tuer.
La liberté d’expression. Chacun a non seulement la liberté, le droit, mais a aussi l’obligation de dire ce qu’il pense pour aider le bien commun. L’obligation. Pensons à un député, à un sénateur: s’il ne dit pas ce qu’il pense être la bonne route, il ne collabore pas au bien commun. Et pas seulement eux, mais tant d’autres. Nous avons l’obligation de dire ouvertement, d’avoir cette liberté, mais sans offenser. Parce que c’est vrai que l’on peut réagir violemment, mais si M. Gasbarri, un grand ami à moi, dit une grossièreté contre ma mère, il recevra un coup de poing! C’est normal! C’est normal. On ne peut pas provoquer, on ne peut pas insulter la foi des autres, on ne peut pas se moquer de la foi. Le Pape Benoît dans un discours — je ne me rappelle pas bien où — avait parlé de cette mentalité post-positiviste, de la métaphysique post-positiviste, qui conduisait pour finir à croire que les religions ou les expressions religieuses sont une sorte de sous-culture, qui sont tolérées, mais qui ne sont pas grand-chose, qui ne font pas partie de la culture éclairée. Et cela est un héritage des lumières. Beaucoup de personnes parlent mal des religions, se moquent d’elles, disons qu’elles transforment en jouet la religion des autres, ces personnes provoquent et il peut arriver ce qui arrive si M. Gasbarri dit quelque chose contre ma mère. Il y a une limite. Chaque religion a sa dignité, chaque religion qui respecte la vie humaine, la personne humaine. Et je ne peux pas me moquer d’elle. Et cela est une limite. J’ai pris cet exemple de la limite, pour dire que dans la liberté d’expression il y a des limites comme celles à l’égard de ma mère. Je ne sais pas si j’ai réussi à répondre à la question. Merci.
Rencontre du pape François avec les journalistes au cours du vol vers Manille, 15 janvier 2015