L'Eucharistie : présence, connaissance, communion

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Homélie pour la solennité du Saint-Sacrement

Dimanche 11 juin 2023

Ce n’est que l’amour qui explique l’Eucharistie

Après avoir fêté la semaine dernière le mystère de la Sainte Trinité, nous célébrons en ce dimanche le Très Saint Sacrement du Corps et du Sang du Seigneur, ce moyen choisi par Dieu Trinité pour venir jusqu’à nous (cf. Benoît XVI, Sacramentum caritatis, n° 8).

L’origine de la solennité du Saint-Sacrement remonte à Jésus lui-même. En 1208, sainte Julienne du Mont Cornillon recevait une étrange révélation. Dans sa vision, la sainte voyait la Lune. Et sur la Lune, une ligne noire qui la traversait. La religieuse fut bien en peine de comprendre le sens d’une telle vision. Celle-ci se répéta deux ans plus tard. Mais cette fois-ci, Notre-Seigneur lui en révéla la signification : « L’Église militante, lui dit-il, est figurée par le globe de la Lune. La tache qui en voile une partie signifie qu’il manque une fête dans l’année liturgique, fête dont Dieu veut l’institution : c’est la fête du très auguste et très saint Sacrement de l’autel. Le Jeudi Saint est trop pris par d’autres cérémonies. Il faut donc établir une solennité chômée et observée dans toute la chrétienté. »

En réponse à cette demande de Jésus, les Papes instaurèrent la solennité du Saint-Sacrement, qui reçut le nom populaire de Fête-Dieu. « Fête-Dieu », comme pour signifier que dans l’Eucharistie, Dieu ne nous donne pas quelque chose, mais qu’Il se donne lui-même, en Personne.

Chaque année, la Fête-Dieu rappelle donc au peuple chrétien que l’Eucharistie est le plus grand des sacrements, le « Saint Sacrement ». Les six autres sacrements nous donnent la grâce. Mais la sainte Eucharistie nous donne quant à elle la source de la grâce : Jésus lui-même. L’Eglise vit de l’Eucharistie. Elle ne prend sens que par rapport à l’Eucharistie. Toutes ses activités : la proclamation de la foi, le don des sacrements, l’enseignement et la pratique de la vie chrétienne, la prière, la charité, sont intrinsèquement orientées vers l’Eucharistie dans laquelle Dieu réalise la communion avec les hommes.

Aujourd’hui, la pénurie de prêtres, mais aussi un manque de foi dans le Saint-Sacrement, ont suggéré à certains l’idée qu’il faudrait désormais apprendre à se passer de l’Eucharistie. Qu’il faudrait développer d’autres expressions de la foi, davantage centrées sur la Parole de Dieu ou sur le partage communautaire. Que l’Eucharistie n’est pas le tout de la vie chrétienne.

À la réflexion, une telle tentation est aussi ancienne que le Saint-Sacrement lui-même. Car, comme nous l’avons entendu dans l’Evangile, la première annonce du mystère de l’Eucharistie coïncide en quelque sorte avec le premier « schisme » des disciples de Jésus. Saint Jean note en effet qu’au moment même où Jésus commence à parler du sacrement de l’Eucharistie, sacrement de l’unité, les auditeurs de Jésus commencent à se diviser entre eux et à se quereller en disant : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Et c’est au moment même où Jésus instituera le Saint-Sacrement et où, par anticipation, Il livrera par amour sa vie à ses Apôtres, que Judas le livrera aux Grands-Prêtres.

L’Eucharistie demeurera donc à travers les âges le grand « signe de contradiction » : folie pour les uns, merveille d’amour pour les autres.

C’est en effet à la lumière de l’Amour que s’éclaire le Saint-Sacrement du Corps et du Sang de Jésus. Ce n’est que l’amour qui explique l’Eucharistie. Nous le savons bien effet, l’amour se nourrit de la présence de celui que nous aimons. Il nous pousse à connaître celui que nous aimons. Et il s’achève dans la communion avec lui. L’Eucharistie vient justement répondre à ces trois besoins de l’amour : la présence, la connaissance, et la communion.

Tout d’abord, l’Eucharistie répond à notre besoin de savoir Jésus proche de nous. Celui qui aime recherche la présence de l’être aimé. Une présence non seulement spirituelle, mais également corporelle. Avec un réalisme étonnant, répond à notre besoin en demeurant au milieu de nous avec son Corps, son Sang, son Âme et sa divinité. Il a comme planté sa tente parmi nous dans le tabernacle. Le tabernacle qui est pour nous comme la tente de la rencontre où, dans le désert, Moïse s’entretenait avec Moïse comme un ami parle à son ami. Dans le désert de ce monde, Dieu nous attend dans le tabernacle pour que nous demeurions en sa présence, dans son intimité.

Mais l’amour cherche également à connaître : l’amour se nourrit de la connaissance de celui que l’on aime. « Celui qui aime ne se contente pas d’une connaissance superficielle de celui qu’il aime. Mais de lui, il veut tout connaître par le dedans et pénétrer ainsi jusqu’au plus intime de lui-même » disait en effet saint Thomas (Thomas d’Aquin, Somme de théologie, Ia IIae, q. 28, a. 2). Or, aussi paradoxal que cela paraisse, les espèces eucharistiques qui nous cachent l’humanité de Jésus nous donnent par ailleurs de connaître son mystère. Les voiles du pain et du vin sous lesquels Jésus se cache nous dévoilent le plus intime de lui-même.

En effet, les hosties consacrées que nous conservons dans le tabernacle de nos églises nous disent quelque chose de l’humilité de Dieu. Elles nous révèlent également la grande docilité de celui qui s’est autrefois livré aux mains des bourreaux pour subir la Passion et qui, aujourd’hui encore, se livre aux mains des hommes pour se faire leur nourriture.

Sous les apparences de l’Eucharistie, Jésus nous révèle donc la grandeur de son amour : car Il faut un amour infiniment grand pour se faire si petit. Quel homme en effet aurait-il pu avoir l’idée de prendre l’apparence du pain pour se faire nourriture pour ses amis, pour demeurer à leurs côtés dans leurs moments de joie et de peine, pour se faire leur compagnon dans les épreuves, leur soutien dans la tempête ? Seul Dieu qui est Amour pouvait avoir une telle idée et pouvait la réaliser. Seul un Dieu dont l’amour est infiniment grand pouvait s’abaisser jusque là.

Enfin et surtout, l’Eucharistie vient réaliser ce besoin de l’amour qu’est la communion. Car aimer en vérité, c’est vouloir ne faire plus qu’un avec celui que l’on aime. En instituant le Saint-Sacrement, Jésus devient un seul corps et une seule âme avec l’Eglise son Epouse. « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui » proclame Jésus.

Aller communier, ce n’est donc pas seulement vouloir recevoir de Dieu sa consolation, sa force, son amour. Communier, c’est également accepter d’être élevé, de sortir de soi, d’être pris dans l’élan de Jésus, dans son don, dans son sacrifice. C’est accepter de nous oublier pour être progressivement transformés par ce que nous avons reçu.

Si nous participons d’une manière vraiment active à la messe, nous serons donc pris dans l’élan de Celui qui a donné sa vie pour le salut des âmes et qui nous invite à faire de même. Notre existence deviendra eucharistique.

L’Eucharistie, témoin de la présence de Dieu, manifestation de son Être et sacrement de la communion, est bien au cœur de notre monde le grand signe et instrument de l’Amour. Le tabernacle parfois délaissé de nos églises nous interpelle. Il nous invite à l’amour. Il semble répéter la question que Jésus avait posé à ses Apôtres, après que beaucoup l’aient abandonné : « Allez-vous me quitter vous aussi ? (6, 67)» En ce dimanche, nous voudrions répondre avec les disciples d’Emmaüs et avec toute l’Eglise : « Reste avec nous Seigneur, car Il se fait tard et déjà le jour baisse » Oui, reste avec nous Seigneur.

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