Aujourd’hui, nous avons besoin de nouvelles arches de Noé

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Homélie pour le 1e Dimanche de Carême

Dimanche 21 février 2021

Le dimanche de la Résistance...

Ce dimanche de carême est appelé traditionnellement le « dimanche des tentations ».

Saint Marc, dont nous avons lu l’évangile aujourd’hui, est plus concis que saint Matthieu et saint Luc, et ne nous dit que très peu de choses sur ce séjour de Jésus au désert. Une phrase cependant nous donne une indication très belle au sujet de la victoire de Jésus sur le Tentateur. Saint Marc précise : « Il vivait parmi les bêtes sauvages, et les anges le servaient. » C’est une manière de souligner l’harmonie parfaite de Jésus, tant avec le monde matériel qu’avec le monde spirituel.

Or précisément le péché est ce qui brise en nous cette harmonie, qui existait avant le péché originel. Jésus a vaincu le Tentateur, celui-là même qui avait fait chuter Adam et Ève. Il inaugure ainsi déjà, par sa victoire au désert, une humanité nouvelle, qu’il veut libre face à la tentation ; mais qui ne peut acquérir cette liberté que par lui, Jésus, le Fils de Dieu, vainqueur du Tentateur.

Après le péché originel, le péché a proliféré et s’est répandu dans des proportions terribles. Saint Pierre évoque aujourd’hui dans la seconde lecture le « temps où se prolongeait la patience de Dieu, quand Noé construisit l’arche », ce temps où les hommes « avaient refusé d’obéir. » Ne sommes-nous pas, aujourd’hui à nouveau, en un temps « où se prolonge la patience de Dieu » ? Une patience que nous pouvons parfois être tentés de trouver excessive… Alors Dieu demanda à Noé de construire une arche, et il envoya le châtiment du déluge.

Le déluge est un événement réel de l’histoire du salut, qui montre précisément où conduit la disharmonie introduite par le péché originel, qui s’est propagé se manière si impressionnante à toute la descendance d’Adam et Ève.

Ce déferlement du péché dans l’ensemble de l’humanité a pris aujourd’hui – comme à l’époque de Noé – des proportions terrifiantes. Ce n’est pas être pessimiste ou prophète de malheur que de voir les choses en face et de les appeler par leur nom. Dieu, qui est riche en miséricorde, avait envoyé alors le déluge, et a demandé à Noé de construire une arche.

Aujourd’hui, nous avons besoin de nouvelles arches de Noé, pour résister aux tentations du Démon qui agresse les âmes avec tant de force.

Ainsi nos communautés, nos églises, nos paroisses, nos mouvements, doivent être comme des arches de Noé, solides, stables, qui permettent aux chrétiens ballotés dans les flots de naviguer « sur le déluge de la post-modernité liquide » (Cardinal Müller).

Benoît XVI soulignait cette nécessité pour notre temps : « Nous avons effectivement, dans une certaine mesure, besoin d’îles où la foi en Dieu et la simplicité interne du christianisme vivent et rayonnent ; d’oasis, d’arches de Noé dans lesquelles l’homme peut toujours venir se réfugier. Les espaces de protection sont les espaces de la liturgie. Reste que même dans les différents mouvements et communautés, dans les paroisses, dans les célébrations des sacrements, dans les exercices de piété, dans les pèlerinages, etc., l’Église cherche à offrir des forces de résistance, puis à développer des zones de protection dans lesquelles la beauté du monde, la beauté de l’existence possible, devient de nouveau visible en contraste avec tout ce qui est abîmé autour de nous. » [ BENOÎT XVI, Lumière du monde ; Le pape, l’Église et les signes des temps, entretien avec Peter Seewald, Montrouge, Bayard, 2010, 272, page 230].

Cette « résistance » dont parle Benoît XVI, nous la voyons en Jésus dans l’évangile d’aujourd’hui : Jésus résiste à Satan, pour nous obtenir la force de résister nous aussi aux tentations et au mal. Ce combat – car c’en est un – est difficile. D’ailleurs, dans l’évangile de ce dimanche, la croix plane sur le séjour de Jésus au désert : en effet, il est fait mention de l’arrestation de Jean-Baptiste, parce qu’il appelait à la conversion même les puissants de ce monde. Jésus nous veut donc forts dans la tentation, qu’il a vaincue pour nous, afin que nous vivions de la grâce reçue au baptême.

Saint Pierre nous dit en ce jour, justement en évoquant le déluge : « C’était une figure du baptême qui vous sauve maintenant. » Le carême est un temps liturgique qui a un double caractère : la pénitence, mais également « la commémoration ou la préparation du baptême » [ Sacrosanctum Concilium, nº 109].

En effet, le carême est un temps pour mieux vivre les engagements de notre baptême, que précisément nous renouvellerons au cours de la veillée pascale. Ainsi, comme les eaux du déluge pendant quarante jours, les eaux du baptême ont enseveli en nous le péché, pour ne laisser en nos âmes que la grâce qui a fait de nous des justes.

Nous devons, en ces quarante jours de carême, travailler à restaurer en nous cette pureté que les eaux du baptême nous avaient conférée. Nous ne pouvons le faire qu’avec la grâce du Sauveur, qui, par ses quarante jours au désert, a vaincu le Tentateur, pour nous obtenir la force de travailler en nous à cette restauration. Ainsi ce dimanche des tentations mérite aussi d’être appelé dimanche de la résistance, et dimanche de la victoire sur le Tentateur.

Que la Vierge Marie nous soit un modèle et une aide, elle, l’Immaculée, qui n’a jamais succombé au péché. Qu’elle nous apprenne, en ce temps de carême, à suivre Jésus dans sa résistance, et dans la victoire qu’il nous a rendue possible. Alors nous goûterons un peu de cette harmonie originelle ; nous verrons se rejoindre en nous le ciel et la terre, comme Dieu l’avait promis à Noé : « Je mets mon arc au milieu des nuages, pour qu’il soit le signe de l’alliance entre moi et la terre. »

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