Éveille en nous cette intelligence du cœur qui nous prépare à accueillir ton Fils

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Homélie pour le 2e Dimanche de l'Avent

Dimanche 6 décembre 2020

Apprends-nous le vrai sens des choses de ce monde...

Nous vivons à une époque où deux écueils menacent l’homme : d’une part la tendance à tout rationaliser et à ne considérer que l’intelligence humaine. Et en même temps, une invasion de l’émotion et du ressenti, qui ne considère plus que le « cœur ».

Curieusement, ces deux tendances, qui semblent contradictoires, coexistent dans notre société. En réalité, cette situation montre que nous avons du mal à percevoir l’homme dans son unité et son harmonie. L’oraison de ce deuxième dimanche de l’Avent est très pertinente à cet égard : « Éveille en nous cette intelligence du cœur qui nous prépare à accueillir [ton Fils]… » L’intelligence et le cœur doivent aller ensemble. Or cette union de l’intelligence et du cœur est un don que Dieu veut nous faire, et que le mystère de l’Incarnation met particulièrement en lumière.

Ainsi, en la fête de Noël, Dieu s’adresse à notre cœur, en se faisant petit enfant dans la crèche, dont la représentation nous touche inévitablement. Et en ce mystère, il est aussi le Verbe – c'est-à-dire la Parole, le Sens, la Raison – qui se fait chair et vient à notre rencontre. Or ce sont précisément ceux qui sont habités par cette intelligence du cœur qui seront prêts à l’accueillir : la Sainte Famille, les bergers, les rois mages… Ainsi, cette authentique intelligence du cœur nous libère de toute entrave, en nous aidant à lever le regard au-delà de notre seul horizon terrestre. Les oraisons de ce dimanche soulignent cela : « Ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton Fils… » L’oraison après la communion est encore plus explicite : « Apprends-nous, dans la communion à ce mystère, le vrai sens des choses de ce monde et l'amour des biens éternels. »

Le vrai sens des choses de ce monde est le signe d’une réelle intelligence du cœur, et il nous incombe de le demander comme une grâce. Mais ce vrai sens des choses de ce monde peut se trouver en opposition avec le monde : « Si le monde a de la haine contre vous, sachez qu’il en a eu d’abord contre moi. Si vous apparteniez au monde, le monde aimerait ce qui est à lui » (Jn 15, 18-19).

En ce dimanche, la liturgie nous présente justement comme modèle d’intelligence du cœur la figure de saint Jean-Baptiste. Aujourd’hui, on considérera que Jean-Baptiste était clivant, trop radical, antimoderne. En effet, il appelait avec force à la pénitence ; il rappelait que pour être prêt à accueillir le Messie, il faut avoir un comportement moral fidèle à la loi et à l’enseignement des prophètes (cf. Lc 3, 7-14).

Saint Jean-Baptiste aurait pu s’embourber dans les discussions alors à la mode, dont étaient friands les pharisiens du temps : les lavages de mains, les purifications de vases, et tant de choses extérieures et seulement humaines. Jésus le leur reprochera sévèrement : « Les doctrines qu’ils enseignent ne sont que des préceptes humains. Vous aussi, vous laissez de côté le commandement de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes » (Mc 7, 7-8). Ces idées mondaines, alors à la mode, cachaient (ou masquaient...) l’essentiel : Dieu. Et en fin de compte elles détournaient le peuple de la véritable attente, qui pourtant touchait à sa fin, celle du Messie qui était au milieu d’eux : Jésus, l’Emmanuel, Dieu avec nous. Saint Jean-Baptiste a rétabli la vraie priorité : « Préparez le chemin du Seigneur ! »

Notre Église aujourd’hui doit se garder d’un risque similaire : le danger de se confiner dans un langage mondain (par exemple sanitaire), et de faire passer au second plan l’appel la conversion, la dénonciation du péché, la vie éternelle, ou tout simplement Dieu, et la prochaine venue de son Fils en la fête de Noël…

L’Église, comme Jean-Baptiste, doit renvoyer à Jésus, montrer Jésus. Elle doit parler de Dieu, encore et toujours de Dieu. C’est ainsi que Jean-Baptiste a préparé les chemins du Seigneur. Peut-être prêcherons-nous dans le désert ? Tant pis. La vérité doit être proclamée. Si l’Église parle le langage de Dieu, et non celui du monde, alors elle sera libre. Or, « Dieu n’aime rien tant que la liberté de son Église », disait saint Anselme.

Aujourd’hui encore cette liberté de l’Église est en danger. Heureusement, des fidèles, notamment des jeunes, se sont levés pour dire, comme les martyrs d’Abitène : « Sans le dimanche, nous ne pouvons pas vivre ! Nous voulons la Messe. Nous avons droit à la Messe ! » La séparation de l’Église et de l’État ne doit pas être à sens unique. Elle ne doit pas être brandie que lorsqu’on veut faire taire l’Église. Quand l’État prétend décider qui peut entrer dans une église, ou ce que l’on doit y faire, il viole ce principe qu’il rappelle si souvent, et l’exploite à son profit de manière despotique. Il outrepasse ses droits, et il piétine ceux des croyants. Joseph II (empereur d’Autriche au XIXesiècle), imbu des idées des Lumières et de la Révolution, est resté dans l’Histoire pour son ingérence dans les affaires de l’Église, jusqu'à préciser le nombre des cierges et leur longueur, ou la façon dont il fallait prêcher, prier et chanter. Il y a peu, cela nous faisait encore sourire… Il fut d’ailleurs appelé par dérision « l’empereur sacristain » et le « premier sacristain de l’empire ». Mais c’était le signe d’une mainmise du pouvoir politique sur l’Église, et d’une forme de persécution religieuse.

Prions la Vierge Marie, à l’approche de la fête de son Immaculée Conception et de la fête de Notre Dame des Neiges. Elle veille sur son Église qui doit rester libre dans ce monde pour préparer les hommes à l’accueil du seul vrai bien : l’Emmanuel, Dieu avec nous. C’est elle qui accomplira, en nous donnant Jésus, cette prophétie d’Isaïe : « Consolez, consolez mon peuple... » Demandons-lui cette intelligence du cœur pour nous préparer à Noël.

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