Sainte Jeanne de France
Une sainte royale (2/2)
Suite de l'article de novembre...
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Devenu Roi, le jeune duc mondain et léger qu’était Louis d’Orléans mûrit, conscient de la grandeur de sa tâche et soucieux du bien de son Royaume et de ses sujets. Une des premières mesures de celui qu’on appellera bientôt « le Père du peuple » consiste d’ailleurs à diminuer d’un dixième les impôts. Bon envers tous, il semble qu’il n’y ait qu’une seule personne dans le Royaume qu’il n’arrive pas à aimer… et cette personne est la Reine ! Dans son cœur, la blessure de son mariage forcé avec Jeanne reste vive.
En 1498, il se fait sacrer Roi sans elle et demande officiellement au Pape de déclarer nul son mariage. Le peuple est consterné. Dans les foires et jusque dans les plus humbles chaumières, l’événement est commenté. Pour Jeanne, qui croit fermement à la validité du Sacrement qu’elle a reçu avec tant de foi vingt-trois ans auparavant, le procès, où sont révélés sur la place publique tous les détails de sa vie intime, est une très lourde épreuve, qu’elle porte cependant avec foi et dignité, forçant l’admiration de tous.
Le mariage à peine déclaré nul, Louis se marie avec Anne de Bretagne et donne à celle qu’il appellera désormais sa « cousine » le duché du Berry. Jeanne y est accueillie avec beaucoup d’affection et de respect par le peuple qui reconnaît déjà en elle une sainte. Sa vie se partage alors entre la prière et la charité envers les pauvres. Elle comprend également que l’heure est venue de s’ouvrir à son confesseur de ce que lui a dit la Vierge Marie, alors qu’elle n’était que petite fille : « Avant ta mort, tu fonderas un ordre en mon honneur. » La Vierge Marie se montre à présent plus précise : « Fais mettre en une règle tout ce que tu trouveras écrit de moi dans l’Évangile et soumets cette règle à l’approbation du Saint Siège. » Jeanne, aidée par son confesseur, extrait de l’Évangile dix vertus de la Vierge Marie, que les religieuses de son ordre chercheront à imiter fidèlement : pureté, prudence, humilité, foi, louange, obéissance, pauvreté, patience, charité, compassion. Des jeunes filles se présentent, attirées par le rayonnement de Jeanne et conquises par le but de la nouvelle fondation : « Être une autre Vierge Marie vivant sur la terre. »
Tout n’est pas facile, cependant : à Rome, des cardinaux refusent de donner leur approbation. Heureusement, le ciel intervient : une nuit, le cardinal le plus hostile au projet a un songe dans lequel il voit la beauté d’un ordre voué à la Vierge de l’Annonciation. L’ordre des Annonciades est alors approuvé par le Saint-Siège. Mais il faut encore obtenir l’autorisation du Roi pour la construction du couvent. Ce dernier, maintenant animé de meilleurs sentiments envers Jeanne, est heureux de pouvoir lui manifester sa bienveillance en acceptant sans tarder.
Jeanne meurt le 4 février 1505, à quarante et un ans. Le roi ordonne des funérailles solennelles et lui-même se rend, dans l’anonymat, à Bourges pour prier devant le corps de celle que désormais il vénère. Le cortège funèbre, accompagné de guérisons miraculeuses, est un triomphe.
« Être une autre
Vierge Marie
vivant sur la terre. »