Bienheureux Joseph Mayr-Nusser (1912-1945) (1/2)
"Quand le Seigneur demande un sacrifice, il donne la force pour l'offrir"
1910, près de Bozen, capitale du Tyrol du Sud. La ferme du Nusserhof est en joie. Les Mayr-Nusser accueillent un joli petit poupon aussitôt confié à la garde du bon St Joseph. Cinq ans plus tard, c’est jour de deuil. Le père meurt pour la patrie au cours de la Grande Guerre. Sa femme, qui doit gérer seule les six enfants et le domaine familial, trouve la force dans sa foi. Chaque jour, elle assiste à la Messe et fait participer les enfants au chapelet. La foi vive qui anime la famille éveille la vocation de l’aîné qui sera ordonné prêtre en 1934. C’est aussi ce terreau qui permettra à Joseph de prendre l’héroïque décision qui le conduira jusqu’au martyre.
Enfant, Joseph est vif, joyeux, parfois indiscipliné. Son carnet scolaire porte la signature de son père en face de chaque note... Jeune, Joseph se corrige et obtient un diplôme dans une école de commerce. Il aimerait faire d’autres études ; les ressources du foyer ne le permettent pas. Aimant la nature, il pourrait reprendre la ferme, mais son manque de sens pratique dans les travaux agricoles s’y oppose.
Que faire ? La réponse qu’il donne se comprend en lien avec la situation politique qui accompagne sa jeunesse. En 1919, le traité de Saint-Germain-en-Laye attribue à l’Italie la partie méridionale du Tyrol jusqu’alors autrichienne. En 1922, à l’arrivée de Mussolini, une politique d’italianisation forcée exige l’emploi exclusif de l’italien dans les écoles et autres lieux publics. Une résistance passive s’organise dans les familles qui conservent, au domicile, leur dialecte et leurs traditions. En vue d’obtenir un travail, Joseph pratique l’italien, tout en parlant l’allemand ou le dialecte tyrolien chez lui ou à l’église. À la maison, il allie étude et foi. Il s’instruit de la Somme théologique de St Thomas d’Aquin et se nourrit des écrits de St Thomas More. Mais il a surtout soif de s’engager pour promouvoir sa foi et les racines chrétiennes de sa patrie. C’est ce qu’il fait en intégrant l’Action Catholique dont il devient le responsable local.
En 1931, lors de son service militaire, il prête le serment de fidélité exigé de tous les soldats italiens. Pie XI l’avait permis avec la restriction mentale : « Restant saufs les commandements de Dieu et de son Église. » En 1932, il rejoint les Conférences de St Vincent de Paul dont il devient le président en 1937. On l’apprécie entre autres pour sa profondeur spirituelle. Dans la Revue de St-Vincent, il écrit : « La capacité d’écouter est le secret pour gagner les cœurs au plus vite. […] Notre vis-à-vis sait discerner quel est son visiteur : le disciple du Sauveur qui nous a enseigné la charité fraternelle, ou monsieur X., fonctionnaire de la bienfaisance. » Il précise: « Il ne s’agit pas uniquement d’apporter aux pauvres un soutien matériel. Une autre tâche incombe aux Confrères : le soutien spirituel des pauvres… Plus que leur bien temporel, c’est le souci de leur salut éternel qui doit nous importer en premier. »
Joseph est aussi très lucide sur la situation des catholiques ; beaucoup disent l’être mais peu le sont. Il prévient ses confrères : « La participation au Sacrifice de la Messe et l’accès à la Sainte Table signifient pour nous reprendre des forces pour le combat quotidien que nous devons mener contre toutes les puissances obscures qui menacent notre salut. »
(À suivre)