Un nouveau mouvement liturgique
En 1989, Joseph Ratzinger réfléchissait sur la nécessité
d’un nouveau mouvement liturgique
« Il n'y pas si longtemps, un jeune prêtre me disait : aujourd'hui nous avons besoin d'un nouveau Mouvement liturgique. Il exprimait son souci de pouvoir se défaire de la superficialité dans laquelle on se conviait aujourd'hui encore. Il ne s'agissait pas pour lui de conquérir des libertés encore plus audacieuses – quelle liberté n'a-t-on encore pas prise ? Il sentait que nous avons besoin de recommencer de l'intérieur, comme l'avait voulu le Mouvement liturgique au meilleur de son existence, quand il ne s'agissait pas d'agir à travers des textes, d'inventer des actions et des formes, mais de redécouvrir le cœur vivant de la liturgie, de pénétrer à nouveaux frais dans son tissu, de se laisser former de l'intérieur par elle en l'accomplissant.
Dans son application concrète, la réforme liturgique s'est toujours plus éloignée de ses origines. Le résultat n'est pas une renaissance mais une dévastation. On a d'un côté une liturgie qui a dégénéré en spectacle où l'on essaie de rendre la religion intéressante par des singeries à la mode, du moralisme hardi et des démonstrations exacerbées dans le groupe des fonceurs. Ici on entretient une prévention d'autant plus large à l'endroit de ceux qui ne cherchent pas dans la liturgie une parade spirituelle mais la rencontre avec le Dieu vivant : devant Lui, ce que nous pouvons faire devient insignifiant, et Le rencontrer peut ouvrir sur la véritable richesse de l'être.
D'un autre côté, on propose de conserver jusqu'à l'extrême la forme rituelle dont la grandeur ne cesse d'émouvoir mais qui devient l'expression d'une position obstinément isolée, ne laissant finalement que de la tristesse. Bien sûr, il y a la moyenne des nombreux bons prêtres avec leurs communautés qui célèbrent la nouvelle liturgie de manière respectueuse et solennelle. Mais l'opposition des deux bords la met en question, et le manque d'unité intérieure dans l'Église fait qu'à la fin lui rester fidèle apparaît à tort à beaucoup comme une variété privée de néo-conservatisme. Dans ces circonstances, une nouvelle impulsion spirituelle devient nécessaire qui nous restitue la liturgie comme agir communautaire de l'Église et qui l'arrache au bon plaisir des pasteurs ou des groupes liturgiques. »