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Le procès du singe

Publié le dans la rubrique (In Altum n° 148)

Notre page culture de ce mois nous ramène un siècle en arrière pour s’intéresser à un procès qui fit date dans l’histoire du « conflit » entre science et foi. N’en déplaise à nos amis animalistes, le singe dont il est ici question n’est nullement la victime de cette affaire, mais le symbole choisi en référence à la théorie de Darwin(en bas) qui était le sujet du litige.

Nous sommes en 1925 dans l’État du Tennessee, aux États-Unis, dans la ville de Dayton. Un jeune professeur de l’école publique de la ville est inculpé pour avoir violé une loi alors en vigueur, qui interdit de nier la création telle qu’enseignée dans la Bible. L’affaire parut opportune et fut montée en épingle par les défenseurs de la théorie de Darwin dans le but de faire avancer la cause, plutôt impopulaire dans l’Amérique de ce début du XXe siècle.

L’accusé fut défendu par un certain Clarence Darrow, tandis que le camp créationniste choisit le célèbre homme politique presbytérien William Jennings Bryan, fervent presbytérien et trois fois candidat à la présidentielle.

Le procès se déroula du 10 au 21 juillet 1925, dans une salle d’audience bondée et brûlée par une chaleur torride. La défense chercha d’abord à démontrer que la théorie de l’évolution ne contredit pas la Bible, stratégie qui se révéla infructueuse de même que celles qui suivirent, la cause étant de toute façon très impopulaire.

La défense n’avait plus d’espoir de l’emporter. Mais Darrow ne jeta pas l’éponge pour autant. Pendant le week-end, il eut une illumination : quitte à perdre, autant discréditer ses adversaires. Pour ce faire, il eut l’idée d’interroger Bryan, pourtant avocat de la partie adverse, comme expert de l’Écriture Sainte. Le procès avait alors perdu l’enthousiasme des foules. Sans y être contraint, Bryan accepta.

Le 20 juillet (photo), Darrow pose des questions concernant la littéralité de la Bible. Il commence par l’histoire de Jonas, puis le déluge, la tour de Babel, etc. L’interrogatoire dure plusieurs heures. Le but de l’offensive est clair : déstabiliser Bryan en l’amenant à reconnaître des invraisemblances dans le récit biblique. Finalement, Darrow porte le coup qui se révélera décisif. Dans le texte de la Genèse, puisque le soleil n’est créé que le quatrième jour, comment les jours s’écoulaient-ils ? Bryan admet qu’on ne le sait pas. Darrow s’empare de l’opportunité. Si on ne le sait pas, peut être les jours étaient ils plus longs ? Et s’ils étaient plus longs, peut être ont-ils duré plusieurs jours, voire des années, voire des millions d’années ? Nous y sommes. Darrow a réussi son coup. Bryan se voit contraint de l’admettre.

Sur ces entrefaites, le juge interrompt la séance. Le lendemain, mardi 21 juillet, le procès est expédié. Les juges se retirent pour délibérer et condamnent John Scopes à une amende de cent dollars. Les créationnistes remportent la victoire judiciaire, mais médiatiquement, ce sont les évolutionnistes qui ont gagné. La loi enfreinte par Scopes, le Butler Act, restera en vigueur jusqu’en 1967. Quant à Bryan, profondément ébranlé par cette affaire, il mourra quelques jours après le procès.

L’Église, elle, continue d’affirmer que science et foi ne s’opposent pas. Une évolution est envisageable, dès lors qu’elle n’exclut pas l’intervention directe de Dieu pour la création de l’âme humaine : l’homme ne peut pas descendre purement et simplement du singe.

 Crédit photo :

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