Déplacement d’une chapelle en Allemagne
C’est une rare et originale alternative à la démolition qui a été mise en œuvre en octobre 2007 à Heuersdorf en Allemagne, pour sauvegarder une chapelle de 8 siècles menacée par l’extension d’une mine de charbon.
Après de nombreuses manifestations, les habitants de la ville ont obtenu que leur chapelle classée monument historique soit déplacée de 12 km, jusqu’au village voisin, Boma. Le projet a été confié à Mammoet, une des plus grosses entreprises de manutention et de transport lourd du monde (5000 employés, et des grues pesant jusqu’à 3200 t), basée aux Pays Bas Dans un premier temps, les murs de la chapelle ont été cerclés pour assurer leur maintien, et les tuiles ont été déposées. Le petit clocher a été empaqueté dans une bâche. Puis les fondations ont été sciées horizontalement afin de désolidariser le bâtiment du sol. De gros vérins ont été glissés à la base des murs ; et la chapelle s’est doucement élevée. Grâce à un jeu de calage, elle a pu être levée à plus d’un mètre du sol. Un entrepreneur en bâtiment a ensuite coulé une dalle sous la chapelle, et la dalle a été fixée à la base des murs pour assurer un socle stable. Les ouvriers ont ensuite glissé sous la chapelle un assemblage de « remorques modulaires autopropulsées (SPMT)». Ce sont des véhicules plateaux de 4 à 6 essieux, mesurant 2,50 m par 4 à 6 m, pouvant porter 40 t et tourner sur place à 360°. Chaque plateau peut être assemblé à volonté avec d’autres pour former n’importe quelle configuration. On y ajoute ensuite un groupe hydraulique en porte à faux pour assurer la motorisation, et l’ensemble est télécommandé. La chapelle a ensuite été déposée sur le plateau, prête à partir, soutenue par 160 roues. Pour assurer le déplacement du convoi de 1000 t et de 22 m de haut, à la vitesse de 1 km/h maximum, 9 jours ont été nécessaires. Des routes ont dû être élargies, des lignes à haute tension soulevées, et deux ponts provisoires ont même été posés… Tout au long du déplacement, une batterie de capteurs était chargée de contrôler à tout moment les éventuels mouvements à l’intérieur des murs, très préjudiciables. Comme pour n’importe quel convoi exceptionnel, mais plus encore lorsqu’ils sont de ce genre atypique, par leur nature comme par leurs dimensions, le tracé du déplacement est longuement mûri : quel est le chemin le plus court ? Y a-t-il des obstacles ? Peuvent-ils être déplacés ? Les moindres détails comptent aussi : quel est l’état des revêtements de chaussées (nids de poules…), les chaussées sont elles en dévers ? Quelle est la largeur des rues qu’il faudra traverser ? Y a-t-il des panneaux de signalisation mal placés ?... La préparation se fait en concertation avec les communes traversées, la police, les ponts et chaussées, les fournisseurs d’électricité… Dommage que ce genre d’opération soit limité à de petites églises, et que la démolition soit souvent, pour les responsables politiques, la solution la plus simple. (Photos : Site de Mammoet)