Carême en Syrie : crépuscule d’une Église…
Message de Mgr Samir Nassar, archevêque maronite de Damas
Cette septième année de guerre en Syrie a vu : 1) L'intensité des combats et des violences. 2) La suite de l'exode à un rythme plus rapide, surtout parmi les jeunes et les hommes, d'où une pénurie aiguë de la main d'œuvre. 3) La crise sociale, l'inflation, le blocus, font des Syriens qui restent un peuple pauvre qui vit de l'assistanat et la mendicité. 4) 80% des membres du monde hospitalier ont quitté le pays, dont 90% de médecins… 60% des blessés meurent par manque de soins. 5) La solution de paix reste lointaine, même bloquée. Les douze millions de réfugiés ne sont pas plus malheureux que le reste du peuple syrien abandonné sur place. Devant cette situation douloureuse, l'action caritative, au lieu de se développer, ne cesse de reculer par manque de structures et d'agents sociaux bien formés. Ainsi le nombre des familles assistées en 2017 se limite à 828 familles, contre 1407 en 2016…Combien seront-elles en 2018 ? Un sentiment de culpabilité nous traverse. Merci Seigneur de pardonner. Ce recul rapide ne nous laisse pas souffler… La situation se dégrade chaque jour, et les partants se défilent devant nos yeux sans que nous puissions les retenir ni leur dire au-revoir… Un déchirement intérieur bien angoissant nous habite. La construction ecclésiale s'effondre doucement. En 2017 : dix mariages au lieu de trente ; sept baptêmes au lieu de quarante. Sommes-nous en train de tourner la page ? Lors de mon installation à Damas, en décembre 2006, un prêtre du diocèse me disait : seras-tu le dernier évêque de Damas ? Trouveras-tu quelqu'un à qui remettre la clé de la cathédrale ? Regardant l'exemple iraquien, j'ai peur que son intuition soit vraie… D'ailleurs, avec les obus aveugles qui tuent les innocents chaque jour, nous continuons à vivre en sursis, entre les mains de la Providence, nous appuyant sur la voix du Seigneur qui nous dit : « N'aie pas peur, petit troupeau... » (Luc 12, 22.) + Samir NASSAR