Autour de Marie, au Cénacle...

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Homélie pour la Vigile de Pentecôte

Samedi 4 juin 2022

Pour attendre le don de l'Esprit-Saint...

Nous voici réunis pour célébrer la Pentecôte, l’un des sommets de notre année liturgique. Nous le savons, célébrer Pentecôte, ce n’est pas simplement se rappeler un événement du passé, mais c’est l’actualiser pour en devenir les contemporains. Demain, l’Esprit-saint va venir pour faire « toutes choses nouvelles ». Demain, la « Force venue d’en haut » va descendre en nos cœurs. Le Seigneur va accomplir, cette année encore, la merveille réalisée dans le Cénacle de Jérusalem, il y a deux mille ans.

Nous ne connaissons pas le détail de ces 9 jours qui ont séparé l’Ascension de la Pentecôte. Le Cénacle est pour l’Eglise ce que Nazareth a été pour Jésus : le temps de la vie cachée, une vie dans laquelle l’essentiel s’est passé dans l’invisible.

Dans les Actes des apôtres, saint Luc nous dévoile cependant l’essentiel de ce temps de vie cachée, dans l’attente de l’Esprit saint. Saint Luc écrit en effet : « [Les Apôtres] montèrent dans la chambre haute où ils se tenaient habituellement. […] Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie la mère de Jésus » (Ac 1, 13-14).

Ce que saint Luc rappelle ici décrit assez exactement ce que nous voulons vivre en ce rassemblement de Pentecôte. Nous aussi, comme autrefois les douze apôtres, nous voulons monter au Cénacle, pour prier ensemble, unanimes, avec la Vierge Marie, afin de nous préparer à recevoir l’Esprit saint.

Tout d’abord, nous voulons monter au Cénacle. Monter au Cénacle, dans cette « chambre haute » dont parle saint Luc, est la première étape pour se disposer à recevoir l’Esprit de Dieu. Monter dans le Cénacle, plus qu’un mouvement du corps, est un mouvement de l’âme, un voyage intérieur. Monter au Cénacle, c’est en effet quitter ce que saint Jean appelle le « monde ». On ne peut en effet vouloir vivre en même temps selon l’Esprit de Dieu et selon l’esprit du monde : entre ces deux esprits, il nous faut faire un choix. Celui qui choisit d’entrer dans le Cénacle fait le choix de s’écarter du monde. Il renonce à Satan, à ses œuvres et à ses séductions. Monter dans la chambre haute avec les Apôtres, c’est refuser d’être le citoyen de Babel et entrer dans l’Eglise, la famille de Dieu. À Babel, dont nous parle le livre de la Genèse, l’homme s’exalte lui-même pour devenir dieu à la place de Dieu. Mais cette recherche de grandeur est une illusion qui conduit à la chute puis à la ruine. « Qui s’exalte sera abaissé » nous dit Jésus. En revanche, celui qui monte dans la chambre haute, vit lui aussi une ascension, à la recherche d’une grandeur. Fuir Babel, ce n’est pas renoncer à la grandeur, mais c’est comprendre que cette grandeur que nous recherchons tous est un don de Dieu. Qu’elle n’est donné que par l’Esprit saint qui, seul, peut nous rendre comme Dieu. Monter au Cénacle, c’est donc espérer que Dieu peut transformer notre pauvreté en sainteté. Que Dieu est plus grand que notre cœur. Qu’il peut nous diviniser car Dieu exalte les humbles en les remplissant de l’Esprit de sainteté.

Nous sommes en cette vigile sur le seuil de la porte du Cénacle. Chacun de nous, en cette vigile de Pentecôte, doit faire un choix entre l’esprit du monde, l’esprit de Babel, ou l’Esprit de Dieu ; entre la fausse exaltation de l’orgueil ou l’humilité qui élève vraiment. Nul ne pourra entrer au Cénacle s’il ne reconnaît d’abord sa faiblesse, son impuissance, ses péchés, son besoin de l’Esprit saint. La porte du Cénacle est étroite. Ne peut y entrer que celui qui se fait petit, que celui qui accepte de redevenir enfants.

Mais, pour recevoir l’Esprit saint, entrer au Cénacle ne suffit pas. Encore faut-il se joindre à la prière des Apôtres.

Entrer dans ce mystère de la prière des Apôtres n’est pas chose si facile. Notre monde, disait en effet Bernanos, est une conspiration universelle contre toute forme de vie intérieure. Entrer dans le Cénacle, c’est donc conquérir de haute lutte le silence. C’est rentrer en soi-même, dans ce Temple de l’Esprit saint qu’est notre cœur, pour y rencontrer Dieu. Le monde autour de nous s’agite. Nos contemporains sont bien souvent ivres de bruit, de sensations fortes, de divertissements, comme pour chercher à étouffer une inquiétude qu’ils n’osent avouer. Babel est la ville du bruit, de l’agitation perpétuelle, de l’absence de repos. Le Cénacle, quant à lui, est un lieu de paix dans lequel on ne sait pas d’où vient l’Esprit et où il va, mais dans lequel, par le silence, on « entend sa voix » (Jn 3, 8).

Demandons nous aussi, en cette Vigile de Pentecôte, la grâce de savoir faire silence. De savoir taire en nous le bruit habituel de nos passions, de nos agitations intérieures. Pour cela, imitons les Apôtres qui, en cette vigile, regardent la Vierge Marie. Jésus avait dit le soir du Jeudi saint, dans ce même Cénacle : « Je vous laisse ma paix, je vous laisse ma paix ». Le soir de la Pentecôte, au Cénacle, les Apôtres comprennent mieux que cette paix n’est autre que l’Esprit saint qui habite dans le Cœur de Marie.

Nous sommes donc au Cénacle, en prière, avec les Apôtres. Mais saint Luc précise que la prière des douze était une prière « unanime ». « Unanime » : una anima en latin. Les Apôtres prient d’« une seule âme », signe qu’ils forment déjà un seul corps. Pentecôte marque le début de l’Eglise, que saint Paul appellera le Corps du Christ et le Temple de l’Esprit.

Cette discrète mention de l’unanimité des Apôtres est d’autant plus significative qu’il y a 50 jours, dans ce même Cénacle, les Apôtres s’étaient disputés pour savoir quel était le plus grand. C’est aussi au Cénacle que Judas, l’un des douze, s’est perdu en trahissant le Seigneur.

En cette veille de la Pentecôte, les Apôtres sont désormais unanimes. Cette unanimité des Apôtres tient probablement aux épreuves qu’ils ont traversées ensemble et qui ont été comme un creuset. Un creuset dans lequel ils ont été fondus jusqu’à ne faire qu’un seul corps et qu’une seule âme. La dernière de ces épreuves a été le départ de Jésus au moment de l’Ascension. Désormais, les Apôtres ne voient plus Jésus avec leurs yeux de chair. Ils n’ont plus la joie de l’entendre de leurs oreilles de chair. Depuis l’Ascension, les Apôtres sont entrés dans la foi comme on entre dans la nuit.

Mais cette séparation physique d’avec Jésus, cette nuit de la foi, les a fait entrer dans un mode de relation supérieur avec Dieu. Dieu échappe à leurs sens pour mieux se révéler à leurs cœurs. Dieu se cache à ses amis pour qu’ils le cherchent, et que cette recherche soit le ciment de leur unité. L’Eglise tient son unité de sa foi, de la joie de croire sans avoir vu.

Enfin, pour achever d’imiter les Apôtres en cette veille de Pentecôte, nous devons nous tourner vers la Vierge Marie. Saint Luc rappelle en effet que les Apôtres étaient réunis en prière avec quelques femmes dont Marie, la mère de Jésus.

Ces 9 jours au Cénacle, sans la Vierge Marie, auraient été bien difficiles. De même qu’un enfant apprend de sa mère ses premières prières lors que le soir tombe, de même l’Eglise apprend de Marie à prier dans la nuit, en restant en éveil. Les Apôtres qui s’étaient endormis au jardin de l’Agonie restent ce soir éveillés, grâce à la Vierge Marie.

En cette nuit qui précède Pentecôte, Notre-Dame veille. Comme à Bethléem avant la naissance de Jésus. Comme dans la nuit de Pâques où elle attendait la Résurrection de son Fils. En cette nuit de Pentecôte, Notre-Dame veille dans la nuit pour préparer les Apôtres à leur nouvelle naissance et à leur résurrection intérieure.

Notre-Dame reste éveillée car elle sait que, depuis le premier jour de la création, tout ce que Dieu réalise d’important commence dans la nuit. « Il y eût un soir, et il y eût un matin » dit en effet la Genèse. Marie est la Nouvelle Êve de la nouvelle création. « Il y eût un soir » : le soir de la nuit du péché, et de la nuit de la foi que Notre-Dame doit traverser. Mais elle sait qu’il y aura un matin. L’Esprit saint, tel le souffle qui planait sur les eaux au premier jour de la création va réaliser une recréation du monde et de nos cœurs. La sainte Vierge le croit avec assurance, même si elle n’en a pas l’évidence. Et elle nous invite en cette vigile à veiller avec elle, en croyant comme elle qu’un jour nouveau va se lever pour nous.

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