Comment faut-il aimer Dieu ?
Homélie pour le 31ème Dimanche du Temps Ordinaire B
Dimanche 3 novembre 2024
« Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu »
« Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu ». Cette parole de Jésus dans l’Evangile de ce dimanche, nous aimerions tous nous l’entendre dire. En effet, qui d’entre nous n’aimerait que le Seigneur le regarde et lui déclare comme au scribe de l’Evangile : « Oui, tu n’es pas loin du Royaume de Dieu » ?
De fait, Jésus pouvait faire ce compliment au scribe venu l’interroger parce que cet homme, qui appartenait pourtant à un groupe religieux hostile à sa personne, avait ouvert son cœur à la vérité. Ce juif au cœur loyal et humble s’est laissé illuminer par la vérité la plus importante et la plus fondamentale de notre foi : seul l’amour compte pour Dieu ; seul l’amour de Dieu et du prochain ouvre les portes du Royaume de Dieu.
Cette rencontre du scribe et de Jésus, chaque chrétien authentique l’a vécue un jour. Les saints ont tous eux aussi et chacun à leur manière, compris la valeur de l’amour. Ainsi, après avoir fait la rencontre personnelle du Cœur de Jésus, Mère Marie-Augusta disait à ses enfants spirituels que « Tout est contenu dans ce verbe merveilleux : aimer », que « celui qui n’aime pas a perdu la vraie raison », ou encore « qu’une seule chose compte pour l’éternité : c’est aimer ».
La rencontre du scribe avec Jésus est donc tout sauf une anecdote. Elle nous rappelle que nous ne pourrons nous approcher du Royaume que dans la mesure où nous comprendrons nous aussi, et du fond de notre cœur, que seul l’amour a vraiment de l’importance, que seul l’amour compte pour l’éternité.
Mais, nous le savons, le mot « amour » est l’un de ceux que nous employons le plus, mais aussi l’un de ceux qui est le plus souvent galvaudé. Au nom de l’amour, les hommes accomplissent bien des actions que Dieu réprouve. Quel est donc cet amour qui pourra nous rapprocher du Royaume ? À quel amour Dieu nous invite-t-il ?
Jésus répond aujourd’hui à ces questions lorsqu’il cite les paroles du Deutéronome - « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force » - tant il est vrai que dans ces quelques mots, Dieu dit tout ce qu’il attend de nous.
Tout d’abord, le Seigneur attend que notre amour se porte sur lui-même : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu ». De fait, il nous faut aimer Dieu pour ce qu’Il est. Dieu résume en lui tous les biens que nous pouvons désirer.
Ainsi, à la question de savoir comment il faut aimer Dieu, saint Bernard a fait un jour cette réponse devenue célèbre : « Vous voulez que je vous dise pourquoi et comment on doit aimer Dieu ? Je réponds brièvement : la raison pour laquelle on aime Dieu, c’est Dieu lui-même ; et la mesure de cet amour, c’est de l’aimer sans mesure ».
De fait, Dieu attend de nous un amour qui ressemble au sien, c’est-à-dire un amour sans mesure : il nous faut aimer dit Jésus « de tout notre cœur, de toute notre âme, de toute notre intelligence et de toute notre force ». Ici, le mot important est le mot « tout ». Avec Dieu, c’est tout ou rien. Dieu attend tout de nous. Et même si nous n’arrivons pas encore à tout lui donner à cause de nos péchés, il attend que nous lui redisions notre désir d’y parvenir un jour. Il nous faut désirer qu’un jour tout de nous soit livré à l’Amour. « Celui qui n’a pas tout donné n’a encore rien donné » disait Marthe Robin.
De fait, on comprend pourquoi Jésus répète au scribe les paroles du Deutéronome qui mentionnaient à la fois le cœur, l’âme, l’esprit et la force. On aura ici reconnu les dimensions qui composent la personne humaine. Toutes les facultés de l’homme sont convoquées à l’amour. Il ne devrait pas y avoir en nous des zones qui soient étrangères à l’amour, comme si notre esprit pouvait être chrétien sans que nos actions le soient. Non, l’amour de Dieu exige tout ce que nous sommes, dans l’unité d’un même désir. L’amour chrétien est un amour qui unifie notre personne dans le don d’elle-même.
En ce mois de novembre, et au terme de notre session sur les fins dernières, cet appel à l’amour que Jésus nous lance résonne d’une façon particulière à nos oreilles. Car, nous le savons, le mois de novembre est consacré à la prière pour les âmes du Purgatoire. Ces âmes qui attendent l’aumône de nos prières et de notre offrande pour leur purification mais qui, en retour, peuvent également nous aider à comprendre la vérité des paroles de Jésus. Elles aussi ne sont pas loin du Royaume. Les âmes du Purgatoire en sont même très proches, puisqu’elles ont compris mieux encore que le scribe le prix de l’amour. Après avoir passé l’épreuve de la mort, et en vivant l’étape ultime de leur purification, elles comprennent maintenant que seul l’amour compte dans une vie. Elles savent désormais avec une grande lucidité que bien des choses auxquelles elles tenaient sur la terre n’ont en fait que peu de valeur en regard de l’amour.
Les âmes du Purgatoire nous engagent donc à ne pas perdre notre temps ici bas pour ne pas perdre notre éternité. Elles nous disent que ce que nous faisons dans nos vies résonne dans l'éternité. Que rien n’est petit pour l’amour.
C’est donc avec elles que nous voulons en ce dimanche redire à Jésus notre ferme résolution de marcher à suite vers la perfection de la charité. Oui, pour le dire avec les mots de Mère Marie-Augusta, « allons de l’avant dans nos découvertes de l’Amour » et devenons en ce monde les témoins de l’Amour de Dieu.