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Le Puits de saint Patrick

Publié le dans la rubrique (In Altum n° 110)

Au début du XVIe siècle, en pleine période de troubles, le pape Clément VII, menacé par les armées de Charles Quint lors du sac de Rome, vint trouver refuge à Orvieto.

Cette petite ville escarpée du centre de l’Italie semblait propice au Pontife et à ses conseillers pour soutenir un long siège. Une crainte demeurait toutefois : en cas de siège effectif, les habitants pourraient-ils compter sur une réserve d’eau suffisante ? En effet, les ressources en eau étaient bel et bien limitées. Pour y remédier, après avoir mené une campagne de recherches hydrogéologiques, on fit appel à un certain Antonio da Sangallo le Jeune, architecte et ingénieur à Florence, pour construire le puits dont on avait besoin.

L’ouvrage, qui existe toujours aujourd’hui, est un chef-d’œuvre d’ingénierie hydraulique. Situé au sommet d’une falaise, il mesure plus de cinquante-trois mètres de profondeur, pour un diamètre de treize mètres. La nappe d’eau qu’il perfore se trouvant d’une part tout à fait au fond, et les besoins en eau étant d’autre part très importants, l’ingénieur construisit deux escaliers en colimaçon enlacés l’un dans l’autre tout autour du puits et totalisant ensemble quelque 248 marches. Eclairés par soixante-dix fenêtres réparties sur la paroi intérieure du puits, à différentes hauteurs, ils permettaient à une noria de mulets d’assurer la remontée de l’eau sans jamais se croiser, évitant ainsi tout risque de collision.

Le chantier dura dix ans, de 1527 à 1537. Pour souligner son caractère exceptionnel, la mention « Quod natura munimento inviderat industria adjecit » (« Ce que la nature a aveuglément camouflé, le génie l’a révélé ») fut inscrite sur le fronton d’entrée. Clément VII ne vit pas de son vivant l’achèvement de l’œuvre. Le puits fut d’ailleurs complété par son successeur Paul III.

Un temps appelé « Puits de la forteresse », il fut plus tard rebaptisé « Puits de Saint Patrick » en référence au « Purgatoire de Saint Patrick », lieu de pèlerinage irlandais constitué d’un puits profond dans lequel Saint Patrick avait eu l’habitude de se retirer pour prier.

Au XVIIIe siècle, le puits acquit une dimension plus spirituelle, puisque la coutume s’établit d’y envoyer les pénitents ayant de lourdes fautes sur la conscience pour qu’ils s’y confessent. La symbolique de la démarche était forte, puisque, en Irlande, le « Purgatoire de Saint Patrick », lieu de référence, était réputé être l’entrée du Purgatoire…

Aujourd’hui, le puits, s’il n’est plus en service, est en revanche un haut lieu du tourisme en Ombrie.

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