In Altum

Notre-Dame des Neiges, formez nos cœurs à votre image

Sachons nous émerveiller !

Publié le dans la rubrique (In Altum n° 113)

à l’école de l’aveugle de la pastorale des santons de Provence

Cette pastorale met en scène plusieurs personnages qui se convertissent le jour de Noël. Nous avons ainsi le meunier faignant  qui se prend à désirer travailler, le voleur qui veut rendre la dinde volée, et la poissonnière qui veut devenir honnête. Au cœur de cette histoire (qui se déroule en trois temps : la conversion des personnes à la naissance de Jésus, leur départ et leur arrivée à la crèche, et l’arrivée des Rois Mages) se trouve aussi un aveugle accompagné du « Ravi ». En ces jours qui suivent la fête de Noël, laissons-nous enseigner par la profondeur de ces réflexions de la belle tradition provençale…

Départ vers la crèche

Le Ravi : Que le monde est joli ! Ce n'est pas possible qu'il soit aussi joli.

L’ange Boufaréo (narrateur) : Les bras toujours levés, et le bonnet de nuit sur la tête, il est venu se mêler à la foule. Soudain il s'arrêta : il venait de voir un vieillard juste sous un porche.

Le Ravi : Qu'est-ce que tu as, toi, à ne pas être heureux ?

L'aveugle : Moi, je suis l'aveugle.

Le Ravi : Il faut que tu sois heureux quand même. Un jour comme aujourd'hui ! Viens avec moi, je te raconterai tout, je te dirai comment ça se passe. Et fais-moi confiance. J'ai de l'imagination, comme je te le dirai, moi, ce sera encore plus vrai que nature !

Boufaréo : Il a pris l'aveugle par le bras, mais il ne savait pas exactement où il devait aller…

Mais voila nos gens qui arrivent en farandolisant, et le Ravi marche le premier en tenant l'aveugle par la main… (…)

(Tous remercient la Vierge Marie)

L'aveugle venait de tomber à genoux, il avait l'air en extase.

Marie : Tu me remercies, toi qui n'as jamais vu le ciel et les étoiles ?

L'aveugle : Je te rends grâce, je chante tes louanges.

Marie : Tu me rends grâce, toi qui vis dans la nuit ? Tu chantes mes louanges, toi qui es enfermé dans la plus sombre des prisons ?

L'aveugle : Le ciel, tu me l'as donné. La lumière, elle est en moi. Je me sens libre comme l'oiseau.

Joseph : Marie, ma belle, il faut faire quelque chose pour cet homme, tu n'as qu'un mot à dire.

Marie : Mon Dieu, qui ce soir avez exaucé tous mes désirs…

L'aveugle : Non, Bonne Mère ! Ce n'est pas la peine. Ne le dérangez pas ! Je sais que le monde il est beau puisque c'est lui qui l'a fait. Je suis sûr que le ciel est encore plus beau, puisque c'est là qu'Il habite. Non ! Demandez-lui seulement que je n'aie pas longtemps à attendre. Faites que j'ouvre les yeux le jour de ma mort. Faites que je voie quand ça vaudra la peine de voir. (…)

L’arrivée des Rois Mages

Boufaréo : Dehors venait d'éclater un tintamarre terrible. C'était les Rois Mages. À force de regarder l'étoile qui devait les conduire à Bethléem ils avaient tous un peu le torticolis. Ils étaient partis depuis des mois, et ils avaient juste un quart d'heure de retard à cause d'un de leurs chameaux qu'ils venaient de vendre. Ils venaient du bout du monde, avec des turbans, des colliers de perles, avec une armée de négrillons qui leur tenaient le pan de la robe.

Le Ravi : Sainte Vierge, qu'est-ce que c'est beau ! Regardez comme ils sont beaux, ces hommes.

Boufaréo : Au lieu de s'agenouiller comme tout le monde, ils s'étaient mis à plat ventre et ils collaient le front par terre en disant : Salamalek, salamalek, salamalek ! L'aveugle se demandait ce qu'il se passait. Le Ravi lui dit : Viens ici, mon pauvre, toi qui n'as pas voulu retrouver tes yeux de peur des vilaines choses de la vie. Celui-là qui est grand et maigre, à la peau toute jaunâtre, il s'appelle Melchior. Il tient dans la main une cassolette d'or et de pierres précieuses. De la cassolette monte une fumée qui sent bon, qui sent bon !

L'aveugle : Oui, je connais, c'est de l'encens.

Le Ravi : Le deuxième s'appelle Balthazar. Il a les dents blanches comme le sommet du Ventoux, et il a les mains rouges comme des pastèques et les joues violettes comme des figues. Il a de grands anneaux aux oreilles. Dans les mains, il tient une urne d'argent, et ce qu'il y a dedans, je ne le sais pas.

L'aveugle : Si ! Il y a de la myrrhe ! Oui, c'est le parfum le plus subtil de l'Arabie.

Le Ravi : Que tu es heureux, toi l'aveugle ! Tu sens les odeurs qui n'arrivent pas jusqu'à nous ! Et le troisième, il a une barbe blanche qui lui descend jusqu'aux pieds. Il est obligé de rester courbé pour pouvoir tenir dans le cabanon. Il s'appelle Gaspard. Il ressemble à mon grand-père. Il tient dans ses mains une grosse malle de cuir. Il y a dedans, tu le sais peut-être, des pièces d'or.

L'aveugle : Je les entends glisser l'une sur l'autre comme les gouttes d'eau d'une rivière.

Le Ravi : Tu avais raison : c'est bien de l'or. Que tu es heureux, toi l'aveugle ! Tu entends les bruits qui ne viennent pas jusqu'à nous. (…)

Boufaréo :

Et voilà ! C'est bientôt fini. Chacun a pris la pose, comme chez le photographe, mais c'est pour l'éternité. La Sainte Vierge et Saint Joseph qui regardent dormir le petit Jésus et qui l'adorent. Ils ont la tête penchée sur les épaules et les mains jointes. Et ça durera jusqu'à la fin du monde. Le Ravi les bras en l'air, l'aveugle appuyé sur sa canne. (…)

Voilà, j'ai dit tout ce que j'avais à dire ! Excusez-moi si j'ai été un peu bavard, c'est dans mon tempérament ! Mais je vous jure que j'ai dit la franche vérité.

Allez, adieu ! Portez vous bien, soyez braves, soyez heureux. Et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté !

NDLR : nous vous encourageons à retrouver l’audio sur Internet, et à l’écouter à tout âge, en famille, à l’occasion de Noël ! Saint Noël à tous !

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