Amoris Laetitia
Communion aux divorcés remariés ? L’exhortation apostolique sur la famille du pape François.
L’accès ou non des divorcés remariés à l’Eucharistie est loin d’être le tout de l’exhortation du pape, mais c’est le point le plus controversé. Quelle importance a cette question ? C’est une question de foi en Jésus qui est Vérité et Vie (Jean 14, 5). Vérité : un remariage après divorce est en contradiction avec la parole de Jésus : « Celui qui renvoie sa femme pour en épouser une autre, est coupable d’adultère » (Mc 10, 11). Vie : nous croyons que la grâce de Jésus est assez puissante pour permettre de vivre la fidélité conjugale dans l’amour. Ce que dit le Pape s’accorde-t-il avec le magistère traditionnel ? Jean Paul II, Benoît XVI et le CEC (n°1650) enseignent que l’on ne peut pas admettre à l’Eucharistie les divorcés remariés, car leur état est en contradiction objective avec la communion d'amour entre le Christ et l'Eglise. Le Pape François considère les dispositions subjectives de chacun : il s’appuie sur le fait qu’il n’est « plus possible de dire que tous ceux qui se trouvent dans une situation dite « irrégulière » vivent dans une situation de péché mortel » (AL 301) et que ces personnes peuvent recevoir « l’aide de l’Église » (AL 305). Il précise, en note et non dans le texte, que « Dans certains cas, il peut s’agir aussi de l’aide des sacrements » (note 351). Il va dans le sens d’une permission au cas par cas. L’exhortation apostolique ouvre-t-elle la porte pour la communion aux divorcés remariés ? De façon générale : non. Mais des orientations sont données pour un discernement cas par cas. Relevons-en 6 : 1- Il faut pouvoir estimer que les personnes ne sont pas en état de péché mortel. Précisons que cela ne va pas de soi car Jésus indique comme condition pour avoir part à la vie éternelle d’observer les commandements, dont le 6ème : « Tu ne commettras pas d’adultère » (cf. Mt 19, 17-18) 2- Il ne faut pas de gradualité de la loi : « La loi est un don de Dieu, un don pour tous sans exception » (AL 295). Donc la Loi divine –Tu ne commettras pas d’adultère – vaut pour tous. 3- Il faut « un cheminement vers l’idéal chrétien avec le désir de parvenir à y répondre de façon plus parfaite » : c’est la loi de gradualité. Le pape y revient dans 7 numéros (291, 293, 294, 295, 297, 300, 308). Donc, il ne s’agit pas de s’installer dans une situation contraire à la Loi divine. 4- Il faut éviter toute occasion de scandale (AL 299) et voir l’exemple que cela peut donner (AL 300). Il s’agit donc que personne ne soit induit à penser que l’indissolubilité du mariage est remise en cause. 5- Il ne faut pas une double morale : il ne faut pas, d’un côté, une morale idéale que l’on considèrerait inaccessible et, de l’autre, une morale prétendument pastorale qui accepterait comme normal ce qui est contraire à l’idéal. 6- Le pape met en garde contre le « grave risque » considérant qu’« un prêtre peut concéder rapidement des ‘‘exceptions’’ » Pourra-t-on éviter les dangers signalés par le pape ? On peut craindre que malgré les réserves mises par le pape, on accordera très facilement la communion aux divorcés remariés (contre le point 6 de la question précédente). Du coup beaucoup de divorcés remariés ne seront plus stimulés à une avancée vers l’idéal chrétien (contre le 3) ; beaucoup de personnes douteront de l’indissolubilité du mariage (contre le 4) ; on aura une double morale (contre le 5). Quelle position avoir dans la pratique ? Prenons au sérieux les orientations du pape. Cela conduit à interpréter son exhortation en continuité avec le magistère précédant, selon lequel il n’est pas possible de donner la communion aux divorcés remariés. Mais comment accueillir dans la miséricorde les personnes divorcées remariées ? Le pape, à la suite de ses prédécesseurs, demande une attitude d’amour et d’accompagnement. Il est certain qu’il y a beaucoup de progrès à faire en ce sens. Il faut aussi soutenir les personnes qui en fidélité à leur mariage choisissent de vivre seules, ou bien vivent dans la continence : elles peuvent beaucoup apporter à ceux qui n’arrivent pas encore à assumer tout l’idéal évangélique du mariage.