Que le cœur de tous mes Prêtres soit le Royaume où Je puisse régner !
Homélie pour la Fête de Marie Reine
Samedi 22 août 2020
Mais que signifie le titre de Reine attribué à la Vierge Marie ?
Une semaine après avoir célébré l’assomption de la Vierge-Marie, nos regards s’élèvent aujourd’hui à nouveau vers le Ciel pour contempler son couronnement comme Reine de l’univers.
La fête de Marie Reine, qui a été instituée récemment (le 11 octobre 1954) par le pape Pie XII, proclame liturgiquement la foi qui animait déjà les Pères de l’Église. Saint Grégoire de Nazianze appelait « Marie mère du Roi de tout l’univers ». D’après Saint Jérôme en syriaque Marie signifie « Souveraine ». La liturgie byzantine témoigne de cette même foi quand elle s’adresse ainsi à saint Joseph : « Ô juste et bienheureux Joseph, par ton origine royale, tu as été choisi d’avance parmi tous pour être l’époux de la Reine immaculée qui mettra au monde de manière ineffable le roi Jésus ». Pour Saint Jean Damascène, la Vierge Marie « est vraiment devenue la Souveraine de toute la création, au moment où elle est devenue Mère du Créateur »1. La prière très ancienne du Salve Regina et la tradition du cinquième mystère glorieux sont aussi un témoignage important.
Ainsi Pie XII a-t-il pu écrire : « Les théologiens de l’église, rassemblant l’enseignement de ces témoignages et de nombreux autres témoignages anciens, ont appelé la bienheureuse Vierge Reine de toutes les choses créées, Reine du monde ; Souveraine de l’univers2 ». Le Concile Vatican II a lui aussi rappelé cette vérité en affirmant : « Marie fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils3 ».
Depuis le concile d’Éphèse la Vierge Marie a souvent été représentée dans l’art sacré habillée en impératrice. Ainsi, dans la basilique sainte-Marie Majeure à Rome, sur les mosaïques de l’arc de triomphe qui sépare l’abside de la nef, sont représentées des scènes de la vie de la Sainte Famille. La Vierge Marie y est toute est drapée d’or. Derrière, sur l’immense mosaïque de l’abside la Vierge Marie siège à la droite de son Fils. Tous deux partagent le même trône orné d’un coussin en pourpre impériale. Jésus de sa main droite couronne sa Mère d’une couronne resplendissante. À droite et à gauche les anges et les saints contemplent émerveillés ce divin spectacle.
Mais que signifie le titre de Reine attribué à la Vierge Marie ? Les papes du XXe siècle ont relevé deux dimensions de la royauté de Marie. « De même – affirmait Pie XII – que le Christ, le nouvel Adam, est notre roi non seulement parce qu’il est le Fils de Dieu, mais aussi parce qu’il est notre Rédempteur, de même, selon une certaine analogie, on peut aussi dire que la très Sainte Vierge est reine, non seulement parce qu’elle est la Mère de Dieu, mais aussi parce qu’elle est la nouvelle Eve associée au nouvel Adam4 ».
Au sujet de la maternité divine de Marie, Pie XII précisait : « L’origine des gloires de Marie, le moment solennel qui illumine toute sa personne et sa mission, est le moment où, pleine de grâce, elle a adressé à l’Archange Gabriel le “Fiat”, qui a exprimé son assentiment à la disposition divine ; elle est ainsi devenue Mère de Dieu et Reine, et a reçu la charge royale de veiller sur l’unité et la paix du genre humain5 ».
Saint Jean-Paul II a expliqué que Marie a aussi mérité son titre de Reine de par sa collaboration à l’œuvre de la Rédemption. « Celle qui s’est déclarée « servante du Seigneur » à l’Annonciation est restée, durant toute sa vie terrestre, fidèle à ce que ce nom exprime ». Elle a vraiment imité son Fils qui a affirmé n’être « pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude » (Mt 20, 28). « C’est pourquoi Marie est devenue la première de ceux qui, « servant le Christ également dans les autres, conduisent leurs frères, dans l’humilité et la patience, jusqu’au Roi dont on peut dire que le servir, c’est régner », et elle a pleinement atteint cet « état de liberté royale » qui est propre aux disciples du Christ ». Saint Jean-Paul II ajoutait : « La gloire de servir ne cesse d’être son exaltation royale : montée au ciel, elle ne suspend pas son rôle salvifique dans lequel s’exprime la médiation maternelle « jusqu’à la consommation définitive de tous les élus »6 ».
À la suite de saint Jean-Paul II, Benoît XVI a relevé l’excellence particulière de la royauté de Jésus et de sa Mère, qui n’a rien à voir avec un pouvoir despotique. « La royauté et le fait d’être roi pour le Christ est mêlé d’humilité, de service, d’amour : c’est surtout servir, aider, aimer ». C’est sur la croix que Jésus a été proclamé roi. Jésus, dit Benoît XVI, est roi « en souffrant avec nous, pour nous, en aimant jusqu’au bout, et ainsi, il gouverne et crée la vérité, l’amour, la justice ». Sa royauté « n’a rien à voir avec celle des puissants de la terre. C’est un roi qui sert ses serviteurs ; ainsi l’a-t-il démontré pendant toute sa vie. Et il en est de même pour Marie : elle est reine dans le service à Dieu à l’humanité, elle est reine de l’amour qui vit le don de soi à Dieu pour entrer dans le dessein du salut de l’homme7 ».
En plus de fixer la fête de Marie Reine au 31 mai, le pape Pie XII avait aussi demandé le renouvellement de la consécration de l’humanité au cœur immaculé de la Vierge Marie, appelant de ses vœux la naissance « d’une nouvelle ère […] réjouie par la paix chrétienne et le triomphe de la religion8 ».
À don Gobbi, la Vierge Marie a dit en 1974 : « Aujourd’hui, l’Église et le Paradis tout entier m’acclament comme Reine. Mon Fils Jésus m’a donné cette couronne de gloire. Si tu savais, mon fils, quelle grande gloire, quel réconfort me sont apportés lorsque Je règne en souveraine dans ton cœur ! Que le cœur de tous mes Prêtres soit le Royaume où Je puisse régner. Aussi, bien vite, mon Cœur maternel triomphera en tous mes fils !9 »
En ce jour de Marie Reine, renouvelons notre consécration à son Cœur. Qu’elle puisse vraiment régner en souveraine en chacun de nos cœurs, dans nos familles, l’Église et le monde entier, que vienne ainsi le triomphe de son Cœur Immaculé. Amen.
Références
1 Citations tirées de l’encyclique de Pie XII Ad caeli reginam promulguée le 11 octobre 1954.
2 Pie XII, Encyclique Ad caeli reginam, 11 octobre 1954.
3 Concile Vatican II Lumen gentium, n. 59.
4 Pie XII, Encyclique Ad caeli reginam, 11 octobre 1954.
5 Pie XII, Discours du 1er novembre 1954.
6 Jean-Paul II, Encyclique Redemptoris Mater, n. 41.
7 Benoît XVI, Audience générale du 22 août 2012.
8 Pie XII, Encyclique Ad caeli reginam, 11 octobre 1954.
9 Message de la Sainte Vierge à don Gobbi le 22 août 1974.