Comme une mosaïque
Homélie pour la solennité de Marie, Mère de Dieu
Mercredi 1er janvier
« Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse, que son visage s’illumine pour nous » (Ps 66)
Ces paroles du Psaume 66 que nous avons chanté, sont le vœu que la liturgie nous propose de nous adresser les uns aux autres à l’aube de cette nouvelle année. Depuis le temps de Moïse, c’est avec ces paroles que les prêtres bénissaient le peuple. Combien avons-nous besoin aujourd’hui de la bénédiction de Dieu sur chacune de nos familles ! Que le Seigneur nous garde tous fidèles en cette année. Qu’il fasse briller sur nous son visage, ainsi que sur le monde entier. Que prenne enfin l’éclipse de Dieu, que les hommes s’ouvrent à sa lumière. Alors pourra advenir le don de la paix que nous demandons spécialement aujourd’hui.
Vous avez courageusement veillé toute la nuit. Je vous épargnerai une longue homélie... Contentons-nous d’entrer une fois de plus dans le Cœur Immaculé de Marie, pour apprendre d’elle à vivre de la foi. Saint Luc nous disait dans l’Évangile : « Marie, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Lc 2,19). Cette petite phrase que nous connaissons bien nous laisse entrevoir le secret de la foi profonde et active de la Mère de Dieu.
La Vierge Marie était attentive aux moindres paroles et faits de la vie de son fils. Dès son enfance elle avait pris l’habitude de scruter les Écritures pour y chercher le visage de Dieu. Elle voulait toujours mieux connaître Dieu et son action en ce monde. Son regard sur les événements n’était pas superficiel. Elle savait lire les signes des temps. Elle les recueillait et les méditait dans son cœur. Le verbe utilisé par saint Luc veut dire littéralement « jeter ensemble » ou encore « rapprocher des choses les uns des autres ». C’est de ce même verbe que l’Église a tiré le mot « symbole » qui devint le nom des premières professions de foi. Dans le cœur de la Vierge Marie se réalise pour ainsi dire la première compréhension, dans foi, du mystère du Verbe incarné. Dans son cœur, la Vierge Marie confronte les prophéties concernant le Messie, les événements de la vie de Jésus, ses paroles parfois mystérieuses (on se rappelle Jésus dans le Temple après trois jours d’une recherche angoissée ; saint Luc nous dit encore : « Sa mère gardait fidèlement toutes ces choses en son cœur » (Lc 2,51)). Tous ces événements ou paroles, la Vierge Marie les recueille en son cœur comme une multitude de petites pierres, et par son regard intérieur de foi, elle les ordonne pour en former une splendide mosaïque : la figure du Fils de Dieu dont elle est la Mère.
Or, non seulement la Vierge Marie est capable de découvrir le sens profond de l’histoire à la lumière de la foi, mais parce qu’elle est Mère de Dieu, et qu’elle participe maintenant de la royauté de son Fils au Ciel, Marie a encore la capacité de guider les événements de l’histoire pour en faire devenir la grande mosaïque voulue par Dieu : que Dieu soit tout en tous.
En ce jour, nous proclamons solennellement que Marie est Mère de Dieu. Le Fils de Dieu a choisi de passer par Marie pour venir jusqu’à nous. Et Jésus en Croix a voulu que nous passions par Marie pour aller jusqu’à Dieu. Marie est Mère de Dieu et elle est aussi notre Mère. Le triomphe du Cœur Immaculé de Marie consiste justement en ce que chacune de nos vies, abandonnées avec confiance dans les mains de notre Mère du Ciel, soit "dirigée et disposée selon sa volonté et celle de son Fils" Jésus pour recevoir sa place dans la grande mosaïque du royaume de Dieu. Pour entrer dans ce grand dessein de salut, il faut cependant parfois passer par la Croix, accepter que la petite pierre que nous sommes soit ajustée, taillée, orientée selon sa plus belle face et placé à l’endroit le plus juste. Mais que pouvons-nous craindre entre les mains de notre Mère Céleste ?
En cette année 2020, ouvrons plus largement encore nos cœurs à l’action maternelle de Marie. Laissons-la ordonner notre vie selon la ressemblance de son fils Jésus. Que chacune de nos existence devienne une belle mosaïque. Ainsi brillera sur nous le visage de Dieu. Amen.