Jésus Christ, ou la véritable manière d'être homme
Homélie pour le 7e Dimanche du Temps Ordinaire
Dimanche 20 février 2022
Il n'y a que sur le chemin de l'amour que l’on découvre la richesse de la vie et la grandeur de la vocation de l’homme.
St Paul rappelle cette grande vérité sur l’homme : « Comme Adam est fait d’argile, ainsi les hommes sont faits d’argile ; comme le Christ est du ciel, ainsi les hommes seront du ciel. Et de même que nous aurons été à l’image de celui qui est fait d’argile, de même nous serons à l’image de celui qui vient du ciel. »
Jésus-Christ est l’homme définitif, celui qui vient du Ciel et qui donne la vie. Il institue la véritable manière d’être homme. Ce rappel nous invite à ne pas vivre pour la terre mais à vivre pour le Ciel. Tout le but de notre vie est peu à peu de devenir un homme du Ciel.
C’est pourquoi Jésus nous donne le Pain venu du Ciel, le pain qui ne fait pas mourir, son propre corps. Ce pain nous transforme toujours plus en être spirituel. Jésus nous a aussi rappelé que « l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » (Mt 4, 4).
Or en ce dimanche la parole qui vient de la bouche de Dieu nous dit : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. [...] À celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre joue. À celui qui te prend ton manteau, ne refuse pas ta tunique ».
Le philosophe Nietzche s’est moqué de la morale chrétienne qui pardonne aux ennemis et qui fait tendre la joue gauche. Pour lui la vraie vie était de profiter dès maintenant du monde et de tout ce qu’offre la vie, de chercher le ciel ici bas, sans se laisser freiner par aucun scrupule [Cf. Joseph Ratzinger Opera Omnia, Jésus de Nazareth, p. 192, collection Parole et Silence, 2014.] Malheureusement ces idées sont passées dans notre manière de concevoir la vie. Aujourd’hui, qui entend parler de vertu, de pureté, de fidélité ? Le pardon est devenu une marque de faiblesse. Le mensonge est une attitude louable pour obtenir ce que l’on veut.
Ne cédons pas à cette mentalité. N’ayons pas honte de l’évangile. N’aimer que ceux qui nous aiment ce n’est pas aimer. A Auschwitz les Nazis étaient capables de beaucoup de prévenance avec leurs proches alors qu’à quelques mètres d’eux, ils exerçaient la plus cruelle barbarie.
Aimer fait mal parfois. Aimer nous arrache à nos sentiments. Aimer nos ennemis fait briller en nous une ressemblance particulière avec Dieu. Jésus en effet, alors qu’il était cloué sur la croix a prié son Père pour ceux qui l’ont livré : « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font ».
Combien ont expérimenté ce pardon transformant. Ainsi cette veuve : A l’après guerre, le Père Werenfried, fondateur de l’AED, était allé prêcher dans une paroisse où les Nazis avaient fait beaucoup de mal. Le curé l’avait averti : ici, mes paroissiens ne veulent pas pardonner aux Allemands ! Mais le Père Werenfried croyait à l’évangile ! Il a prêché avec énergie et détermination en disant que si l’on ne pardonnait pas, on ne pouvait pas se dire « chrétiens ». Le curé tremblait ! A la fin de la Messe une personne est venue faire un don pour les Allemands. Ceux-ci avaient tué son mari, son fils et un autre membre de sa famille !
Jésus donne le remède le plus efficace pour vaincre la haine : le pardon des ennemis ! La haine ne crée rien, elle détruit ; seul l’amour construit. Le Sermon sur la montagne où Jésus nous demande d’aimer nos ennemis, d’être doux, pur, artisan de paix, miséricordieux, de vivre les dix commandements avec plus de précision... n’est pas au goût du jour ! Cependant, vivre le contraire pour être soi-disant maître de sa vie et profiter jusqu’au bout de tout ce qu’elle peut nous offrir est destructeur de l’homme.
Vivre pour la terre c’est être fragile comme l’argile et retourner à la poussière. Seule la voie des commandements et des béatitudes nous fera passer dans la vie qui dure et nous transformera en être pour le Ciel.
Les saints l’ont vécu et nous ont montré le vrai visage de l’homme et de son bonheur. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus l’avait bien compris lorsqu’elle écrivait : « L’âme se nourrit de sacrifices. Plus l’âme se refuse des satisfactions naturelles, plus sa tendresse devient forte et désintéressée. » [Manuscrit C, 21v].
Sainte Jacinthe et saint François de Fatima que nous fêtons aujourd’hui l’ont appris de la Vierge Marie. Il n’y a que sur le chemin de l’amour, dont les parcours sont décrits dans le Sermon sur la montagne, que l’on découvre la richesse de la vie et la grandeur de la vocation de l’homme. Benoît XVI écrivait : « Prenons résolument ce chemin même s’il est parfois étroit et escarpé ; seulement ainsi nous serons heureux » [Joseph Ratzinger Opera Omnia, Jésus de Nazareth, p. 193]. Il nous fait sortir de nous-mêmes. L’homme est devenu un être d’argile en voulant vivre pour lui-même ; il devient un homme du Ciel quand il vit pour le Royaume de Cieux, c’est-à-dire quand il sort de lui-même. N’ayons pas peur de prendre résolument ce chemin !