Un innocent qui souffre répand sur le mal la lumière du salut

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Homélie pour le 29ème Dimanche du Temps ordinaire B

Dimanche 20 octobre 2024

Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos.

« Sang sur la neige. L’innocence et le mal. Que le mal lui-même soit pur. Il ne peut être pur que sous la forme de la souffrance d’un innocent. Un innocent qui souffre répand sur le mal la lumière du salut. Il est l’image visible du Dieu innocent. C’est pourquoi un Dieu qui aime l’homme, un homme qui aime Dieu, doivent souffrir »

C’est une citation de Simone Weil, la philosophe, morte au service de la Résistance, à Londres, en 1943. Cette méditation peut nous aider à lever un petit voile sur le mystère de la Rédemption, le mystère du serviteur souffrant annoncé par Isaïe, huit siècles avant la naissance de Jésus. La mort de Jésus, c’est la mort du Dieu totalement innocent, absolument sans péché. La mort de Dieu qui aime l’homme. Qui vient prendre sur lui notre mal et le racheter. Il savait, en s’incarnant, le prix de Son Amour : « La croix a été plantée dans mon cœur dès le premier moment de mon Incarnation », avait-il dit à sainte Marguerite-Marie.

Le grand converti André Frossard a écrit, dans un très beau chemin de croix :

« Ô Christ ! Voilà ton crime, tu étais sans péché parmi des hommes sans innocence. Il fallait que tu meures et ils t’ont condamné. Et nous étions présents, car à cet instant, toute l’histoire du monde s’est enveloppée autour de Toi comme le manteau couleur de sang dont les exécuteurs vont te revêtir ».

Oui, dès le moment de son Incarnation, Jésus le sait. Il sait qu'Il est venu apporter la Vérité, et que le mensonge s'y opposera de toutes ses forces ;  Il sait qu'Il est venu apporter la lumière, et que les ténèbres refuseront de s'y ouvrir. Il sait qu'Il est venu apporter l'Amour, et que la haine satanique ne le supportera pas. Satan et les démons se sont acharnés contre Jésus. Mais sa souffrance est notre justification, sa mort est notre Rédemption. Il est le grand-prêtre qui a traversé la grande épreuve de la souffrance et de la mort, sans jamais cesser d’aimer. Et qui précisément pour cela, après avoir traversé la mort, est entré dans les Cieux comme le grand-prêtre qui intercède sans cesse pour nous.

Jésus connaît donc de toute éternité le prix de l’Amour. C’est la raison pour laquelle Il prépare si souvent ses Apôtres au drame de la Passion. Il veut les faire adhérer au dessein divin. Mais il s’est heurté, tout au long de sa vie publique, à un mur d’incompréhensions. Des incompréhensions venues de ses plus proches, ses Apôtres. L'Évangile de ce jour en donne un témoignage éloquent : « Accorde-nous de siéger, l’un à ta droite, l’autre à ta gauche, dans ta gloire ».

Pour mesurer combien cette demande est décalée, il faut la situer dans son contexte. Nous sommes dans les dernières semaines de la mission publique de Jésus. Bientôt, tout sera accompli, et l’accomplissement suprême sera la Croix, la vie offerte de Jésus. Cette demande des deux frères, Jacques et Jean, intervient immédiatement après la troisième annonce de la Passion. Une annonce encore plus précise que les deux précédentes : « Voici que nous montons à Jérusalem, et le Fils de l’homme sera livré aux grands prêtres et aux scribes ; ils le condamneront à mort et le livreront aux païens, ils le bafoueront, cracheront sur lui, le flagelleront et le tueront, et après trois jours Il ressuscitera ». Troisième annonce de la Passion, et troisième incompréhension des Apôtres. Sans doute la plus douloureuse pour Jésus, parce qu’on pourrait la qualifier d’incompréhension orgueilleuse. Jésus vient de parler de larmes et de sang, mais les deux frères, Jacques et Jean, parlent de gloire et d’honneur.

Le vendredi saint, Jésus répondra à cette incompréhension  de la manière la plus sublime. Comment ? Précisément en accomplissant les paroles qui concluent l'Évangile de ce jour : « Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude ». Il opposera à l’incompréhension orgueilleuse des Apôtres Jacques et Jean sa soumission amoureuse, son humilité radicale, se faisant obéissant jusqu’à la mort, et la mort sur la Croix. 

Et les Apôtres se souviendront alors de cette leçon de vie qui vaut pour nous aujourd'hui : « Celui qui veut devenir grand sera votre serviteur. Celui qui veut être le premier sera l’esclave de tous ». Suivre Jésus, c’est accepter de porter sa Croix avec Lui. C’est savoir que le prix de l'amour en ce monde est souffrance. Celui qui veut suivre Jésus, qui veut être fidèle à la vérité, marcher sur la route de la sainteté, est signe de contradiction, souvent jusque dans sa propre famille ; suivre Jésus, ce n'est pas choisir une petite vie tranquille à l'abri des soucis du monde ! C'est au contraire porter dans le monde la paix de Jésus, qui n’est pas celle de ce monde, car comme le dit saint Paul, « Jésus a fait la paix par le sang de sa croix ».                     

Chers foyers amis présents pour votre rassemblement annuel, et chers amis de notre Famille religieuse, dans deux jours, nous fêterons saint Jean-Paul II. Du haut du Ciel, il continuera de nous lancer son grand appel : « N’ayez pas peur ». Actualisons-le, ce grand appel, à l'Évangile de ce jour : N’ayez pas peur de la Croix de Jésus. N’ayez pas peur de la porter avec Lui. Elle se présente à vous tous les jours : c’est votre fidélité dans votre devoir d’état d’époux, d’épouse, de parents. Elle est plus lourde, cette croix, en ces temps où votre Lumière, celle qui nous vient du Christ, doit briller dans un monde de plus en plus obscur, qui menace de nous engloutir. N’ayez pas peur, car Il sera toujours là pour la porter avec vous. Et la Vierge Marie, debout au pied de la Croix, sera aussi avec vous et soutiendra vos combats pour remporter, avec Jésus, la victoire de l’Amour. Mère Marie-Augusta nous redit : « La Croix, c’est l’Amour, l’Amour, c’est la Croix. La Croix, l’Amour, c’est la vie éternelle ».

            Concluons avec un extrait du testament spirituel d’un saint prêtre, le Père Cyril Gordien, qui nous précède dans la maison du Père, et qui nous précédés aussi dans l’acceptation amoureuse de la Croix. Au cœur de son épreuve, hanté par la maladie qui ravageait son corps et qui aurait pu entamer sa foi, son espérance et sa charité, il donne ce témoignage bouleversant :

« Dans l’abbatiale de saint-Wandrille, je contemple la Croix du Christ, qui resplendit au milieu des ténèbres. Elle est illuminée tandis que tout est obscur alentour. Notre Seigneur Jésus a choisi librement le chemin de la Passion. Lui, l’Innocent, est mort crucifié sur cette croix effrayante, laquelle est pourtant devenue le signe de notre foi et l’instrument de notre salut. J’essaye de discerner un chemin lumineux au cœur de mes souffrances. Je regarde le Christ qui a donné sa vie pour moi. Suis-je prêt à donner ma vie ? Quel sens ont mes souffrances ? Mes larmes se mêlent à celles de la sainte Vierge, debout, au pied de la croix. C’est ma consolation. Je reçois cette parole de l’Évangile du jour comme une flèche de feu qui perce mon cœur et m’apporte réconfort et espérance : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme. Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger » (Mt 11, 29-30). »

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